Ignace pousse la porte du séjour. Sur son dos, il a toujours son sac d’où sort, bien visible, le goulot d’une bouteille où clapote un vin maison. Derrière lui, il y a papa, c’est-à-dire Émile ; mais il y a aussi, entre eux deux, une jonchée de miettes et de particules brunâtres et noirâtres qui copieusement souillent le sol et manifestement proviennent de ses souliers. Et c’est ce que Juliette remarque en premier ; mais sans y accorder plus d’intérêt que ça. Là où n’importe quelle mère aurait aussitôt bondi et élevé la voix, l’aurait grondé, tancé, puni, corrigé, elle, Juliette, ne fait que constater ; car elle sait qu’il s’agit de terre, et cette terre, elle la connaît bien, c’est la terre dont le carrelage du couloir est constamment recouvert, de la porte d’entrée jusqu’à la cage d’escalier au fond, jusqu’à la porte de la cave sous la cage – cave inaccessible, tant à cause de l’absence de clefs qui cliquettent uniquement dans la poche du propriétaire que du tas de terre qui en bouche le bas de la porte – et la porte de la cour, elle non obstruée, mais tout de même non utilisable car seul Robert en a la clef.
« Non... c’est Ignace qui vient de rentrer... Quoi ?... Non, attends, je vais lui demander... »