- Roland ose enfin relever le regard sur Édith, tandis qu’ils s’apprêtent à se rejoindre devant la porte du cabinet médical où, il y a quelques jours, le hasard des places occupées avait fait qu’ils s’étaient retrouvés l’un à côté de l’autre ; l’un et l’autre étaient venus consulter Martine pour un identique étrange mal et venaient pour la même raison : une accélération des pulsations cardiaques, une tension musculaire ventrale douloureuse, des bouffées de chaleur s’apparentant à de la fièvre, des tremblements accompagnés de frissons, des épanchements nocturnes incontrôlables, c’est-à-dire autant de symptômes qu’ils partagent sans le savoir à chaque fois qu’ils se voient ou qu’en pensée ils se nomment, et qu’ils n’ont pu confier au docteur ce jour-là puisqu’Édith, ne pouvant plus supporter une telle proximité statique et forcée, a fui la salle d’attente, suivie aussitôt par Roland qui, submergé de honte, est allé se terrer dans son appartement ;

- Arsène a le nez collé à la fenêtre de sa chambre de l’hôtel V. et suit sur le trottoir d’en face la progression d’une femme un peu boulotte, pourvue de vêtements criards et d’une mine revêche et hautaine ; sa démarche, qu’elle veut altière et distante, est ridicule et pitoyable, et Arsène ne doit qu’à une ultime fibre encore vivace d’avoir reconnu en cette personne rebutante sa Marina d’antan...