Victor deale à quelques rues de là, et Hugues ne répugne pas, de temps à autre, à lui donner un petit coup de main. En effet, il est super, Victor, et pour s’en convaincre, il n’y a qu’à écouter le rire qui secoue ses deux comparses d’occasion alors qu’ils passent la porte d’entrée du foyer.

« Super ! » fait Hugues en manquant de s’étouffer.

« Génial ! » éructe Aubin entre deux hoquets.

Victor savoure sa propre blague avec juste ce qu’il faut de sourire pour conserver sa distance vis-à-vis de ces deux idiots qu’il condescend à regarder comme un grand frère ses cadets. À ses yeux, ce petit extra nocturne n’est tout au plus qu’un exercice, petite faveur accordée à celui qui le considère comme un ami et que lui ne voit que comme un modeste passeur. À présent, il n’a qu’une hâte, les planter là et s’en aller sévir ailleurs.

Ils sont donc là devant la porte du foyer – Hugues et Aubin à se tenir les côtes, Victor à les regarder, leur octroyant encore quelques instants de son estimable présence – lorsque Roland traverse la chaussée et, en se faufilant entre deux voitures à l’arrêt, pose le pied sur le trottoir à deux pas d’eux...