– Même les parents ?
– Surtout les parents ! »
Émile et Juliette ont achevé de faire les valises, les leurs comme celles des enfants : les leurs pour la Grèce, celles des enfants pour l’obscure colonie à l’autre bout du pays.
Le nez contre la vitre de la fenêtre de la cuisine, Alphonse regarde sans la voir la cour qu’une curieuse fantaisie du propriétaire a dévolu aux locataires du premier et que Robert tâche de transformer en champ miniature.
Alphonse voit les minuscules et innombrables pousses qui affleurent et constellent la terre, cette même terre que Didier, l’adolescent du second, compisse régulièrement. Alphonse le sait, il l’a déjà vu faire, et en y pensant à ce moment précis où il attend son frère, il sourit, en n’ignorant pas en outre les incessantes querelles qui opposent son père à Robert, tant à cause de la privation de la jouissance de la cour dont souffre son père que de la terre qui y est entreposée – là comme dans le fond du couloir – et qui ne peut apporter que des saletés et des microbes. Sans compter Antoine, le fils, qui inlassablement répète les Élucubrations en prévision de la disparition de leur véritable auteur, et Marina, l’épouse, fardée et crâneuse, qu’en trois ans on n’a pas vue une seule fois lever la tête et ouvrir la bouche pour dire bonjour...