De San Stefano à Furlani, il n’y a pas plus de deux ou trois pas et il aurait été un peu bête de ne pas les franchir. Je me suis demandé si j’allais réussir à retrouver cette petite église où, l’été dernier, Léo et moi avions trouvé porte close. Je l’ai retrouvée, c’était ouvert. C’est minuscule et le grand intérêt, ce sont les peintures de Carpaccio, encore que j’aie été déçu à la fois par leur taille et par leur facture ; je les ai trouvées ternes et me suis même demandé s’il s’agissait bien des originaux. Éléonore a ensuite proposé que nous allions à la fameuse librairie Calle Lungo. « Is it far ? » « Nothing is far in Venice. » Ce n’était pas tout à fait faux. En vérité, j’ai remarqué durant ce séjour où nous étions dans la ville même, et que nous avions plus ou moins décidé de ne pas prendre le vaporetto, que tout est joignable à pied. À preuve, l’Arsenale avant-hier… Ce n’était en effet pas très loin, il suffisait de rejoindre Formosa et on y était. De la même manière, j’ai voulu y aller en ne me fiant qu’à ma mémoire et ça a marché. Je savais déjà qu’il n’y avait pas grand-chose dans cette librairie (mais je devrais dire bouquiniste), mais c’est un lieu insolite à l’image de son propriétaire. L’entrée est évidemment consacrée aux ouvrages pour touristes. Je les ai malgré tout survolés et c’est là que j’ai noté ce Venezia. Mais c’est surtout le sous-titre qui m’a attiré : « Come é stata costruita e come vive ». Je l’ai feuilleté. Il y a de nombreux plans, gravures, photos, schémas et du peu que j’en ai lu, ça m’a semblé suffisamment intéressant pour mériter l’achat. Mais il était neuf et donc vendu en tant que tel. Par bête principe, je l’ai reposé en me disant que de toute manière il y avait toutes les chances que je ne le lise jamais. Je suis allé jeter un œil dans la seconde pièce où je n’ai rien trouvé. Je suis revenu à ce livre que j’ai finalement emporté. Éléonore y a trouvé une édition ancienne de lettres de Virginia Wolf qui, selon elle, est une mine. Le mieux à faire en sortant, était de fêter cela avec un spritz. J’ai pensé à Giaccomo et Paolo, c’est à deux pas. Nous nous sommes installés à une terrasse d’un bar tenu par des Chinois. Elle voulait aller ailleurs, j’avais dit que ça n’avait pas d’importance, et de là, je faisais face au condottiere. Elle a entamé son Wolf, j’ai entamé mon Venezia. Très vite, j’ai été pris, très vite j’ai senti qu’il allait apporter des réponses à mes questions au sujet de la ville, mais qu’il allait aussi être un puits de renseignements. Il était 18 h 15 lorsque je suis entré pour régler. C’est le plus cher que nous ayons payé pour un spritz à Venise, près du double de celui de San Barnaba...
13 novembre 2009