(Demain, répétition générale et mise en place pour le concert de dimanche. Curieusement, je ne ressens encore aucune tension. J'ai l'impression que c'est demain, une fois dans les lieux, que cela commencera...)

  

Boulez. Tout cela manque singulièrement de fantaisie (mais à quoi m'attendais-je donc ?). Froideur, surcroît de « sérieux ». Intellectualisme bien-pensant (ses propos et les « témoignages » aussi bien). J'approuve nombre de ses remarques, mais nous ne parlons pas de la même chose, ne les appliquons pas aux mêmes choses. Il prône l'ouverture, l'individualité avant le groupe, mais il reste un pilier d'une institution : l'institution de la musique contemporaine dans l'univers déjà bien clos de la caste classique. C'est un pionnier en cellule, froide et figée. Pensant à l'étroitesse des références et de la culture qui y est attachée, je ne peux que le plaindre, que les plaindre (voir l'avis des trois jeunes compositeurs soumis à un identique questionnaire : il y a là de la sclérose, de la rouille : ils sont déjà immensément vieux). Quelle musique peut-elle sortir d'un bunker où des clones s'incarcèrent pour le tripotage à longueur de jour d'un quelconque mégahertz déjà momifié ? Satisfaction. Suffisance. Fermeture, quoi qu'il en soit. Et certitude. Boulez dit ne pas détenir la vérité, alors qu'il l'est tout entière en tant que représentant... Il n'est pas de ce monde. Il n'est plus de ce monde. Le monde dont il parle, et depuis lequel il parle, est un monde d'égarement et de chambre sourde et aveugle. Encore et toujours, il(s) ne parle(nt) pas de la musique, mais d'une musique, celle d'une décomposition, celle d'une mort vouée à l'éternelle répétition : la mort de l'âme, du souffle, de l'émoi, de la grâce. (Et Satie de pouffer, Cage de sourire, et Schnittke – pas même cité – de soupirer, tous trois pétris de la malice et de l'intelligence qui font s'unir émoi et pensée...)

 

Casanova, suite. Je passe du 1er volume au 2e : il quitte Rome pour gagner Constantinople... Sollers dit que c'est un chef d'œuvre, Lacassin dit que c'est un chef d'œuvre. Je n'en sais encore rien, et à dire vrai, je m'en fiche. Ce que je sais, c'est que c'est vif, libre, réjouissant. La langue est belle avec ses maladresses et ses italianismes, avec sa sincérité, avec ses images de sensualité et de jouissance qui racontent un temps de plaisir où les filles et les dames s'offrent avec naturel, grâce et esprit. Avec vie...
Lui-même est naturel, grâce et esprit...

 

Casanova ou l'heureuse alliance de l'esprit et de la chair,
la chair qui ni n'abdique ni ne se soumet, mais répond,
comme à une invite adressée, et non empressée.

 

Question : est-ce que je pense à l'âge, et y pensant, est-ce qu'il pourrait être un frein, un obstacle (si tant est que je puisse avoir le courage de l'aborder ou de saisir une occasion qui se présenterait, et rien n'est moins sûr que cela), est-ce qu'il me ferait reculer, me ferait prendre conscience à un moment ou un autre de la gravité et du caractère répréhensible qu'on accorde généralement à cet acte (ou à l'idée de l'acte, puisque dans ce cas le simple attouchement est déjà suffisant pour que l'on invoque le mien), moi n'y voyant rien que du naturel puisqu'il s'agit d'une réponse à un désir, ou à une simple envie, ou même, à de la simple curiosité ?...

 

Je la raccompagne à 4 h 00 du matin. Au moment de quitter la voiture, elle tente de me voler un baiser. Du moins, je le crois. Il y a eu à ce moment-là un court, très court instant de confusion, de flottement : la première bise sur la joue, près de la bouche, comme cela est devenu une habitude, et la seconde, la sienne, livrée à l'air, comme si, à ce moment-là, elle s'était attendu à ce qu'effectivement je lui propose mes lèvres et que celles-ci, puisque ce n'était pas mon intention de le faire, se soient détournées, ou du moins se soient déplacées normalement pour leur proposer ma joue, fût-ce à un endroit près de ma bouche. Ainsi son baiser a-t-il claqué dans le vide. Moment de gêne, de part et d'autre, et j'ai la nette impression, vu la manière précipitée dont elle a quitté la voiture et s'en est allée, qu'elle s'est trouvée bête. Et peut-être même blessée. Vexée...

 

Journée d'hier passée à l'occupation des lieux de l'Impoli, bd de Strasbourg, où nous jouerons dimanche à 16 h 00. Installation, balance, réglages, répétition. L'ensemble ne me semble pas encore au point. Nous nous voyons dimanche à 10 h 00. Cela me paraît bien insuffisant. J'espère que tout ira pour le mieux, surtout pour moi, même si ma participation est épisodique (quatre morceaux seulement !) et simpliste. Justement : c'est ce simpliste qui me fait peur.
Nulle tension hier, mais qu'en sera-t-il dimanche ?

 

R*** a été arrêtée hier par la police sur le parking de la CRAM après une poursuite cinématographique : détournement de près d'un milliard de centimes par la création de faux dossiers « veuvage ». Pas mal…

 

SdeF est de nouveau en plan. J'ai décidé de l'oublier jusqu'à la fin du mois, puis de lui consacrer entièrement la première quinzaine de mai que je vais prendre en congés. Jusqu'à cette date,
je ne penserai qu'au Rapport.

 

Un peu de soleil. Temps couvert. Un peu froid.
Ce n'est pas encore vraiment le printemps...

 

Rien à noter. Fatigue, seulement.
J'ai hâte de prendre quelques jours de repos.
Début mai, certainement...

 

Retour à l'ancienne formule du cahier d'écolier qui, tout bien réfléchi,
me convient mieux, ne serait-ce parce qu'à la différence du carnet blanc,
je puis le mettre à plat...

 

Dans ma tête naviguent des claviers…

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