Un jour, je deviendrai fou. En prévision, posté devant la glace, je m'entraîne à diverses expressions adéquates...
Enregistrement chez Francko de la
première interview
pour le projet de Francine, Robert Delporte.
C'était Johannes, que je n'avais pas vu depuis Erlangen,
il y a bientôt cinq ans de cela !
Cinq ans !
Visite surprise à l'atelier de
Janusz, rue d'***.
Son nouvel atelier.
Superbe...
Mon voyage avec Casanova se
poursuit.
Beau voyage dans la Venise de son adolescence ...
Journée magnifique encore...
Trop beau. Et je suis fatigué.
Je suis allé consulter mon médecin qui m'a conseillé
de prendre quelques jours de repos.
Ce que j'ai accueilli avec une certaine joie...
J'ai passé une partie de l'après-midi au jardin, entre 13 h 00 et 16 h 30,
tranche horaire durant laquelle je puis espérer un peu de soleil sur moi...
Tout va bien...
(Passage-éclair de N*** sur sa bicyclette !)
Que s'est-il passé depuis la
dernière fois ?
Je ne veux pas le savoir.
Je n'ai pas la moindre envie d'écrire...
Sollers, encore, toujours. Décidément... Art Press. Propos desquels je relève cette phrase qui me laisse extrêmement songeur : « L'artiste, c'est quelqu'un qui, à ses risques et périls, fait un pari sur le temps. » Et en l'écrivant, je me demande si ce n'est pas « risques et périls » qui est le plus important...
Mais aussi, cette phrase de
Casanova qu'il relève :
« Tous mes malheurs ont toujours été de ma faute. »
Hier, après un court métrage à
l'inanité consternante – dont je n'ose même pas essayer de me souvenir du nom de
l'auteur –, Karnaval. Que je n'avais pas l'intention de voir : que
pouvais-je attendre d'un film dont il me semblait déjà avoir tout vu ? J'y ai
malgré tout accompagné Susan. Pour voir. Par curiosité. Pour pouvoir apporter
une réponse à la question que malgré tout je me posais : quel film de fiction
peut-on bien tirer du carnaval de Dunkerque ? J'ai la réponse : rien.
Le carnaval n'est qu'un prétexte, qu'un accessoire à une historiette amoureuse
mettant en conflit, évidemment, l'arabe et le prolétaire. Le carnaval n'est
qu'un truc, un procédé destiné à cacher une totale médiocrité : celle d'un
scénario, celle d'une mise en scène. C'est un film frauduleux, trompeur.
Opportun. Exotisme régional au service du vide de la pensée. Cet événement si
particulier et spécifique qu'est le carnaval peut exiger un regard, une pensée.
Il n'a inspiré rien d'autre que la pauvreté esthétique et mentale. Des milliards
se perdent pour alimenter cette pauvreté qui, de surcroît, est acclamée.
(Pourquoi le K en lieu et place du C, que rien ne semble justifier ?) Et que penser du comportement quasi invraisemblable (animal, clinique) du mari dans Karnaval ? C'est un fou furieux. Où est la nécessité de son comportement ? On peut très bien être amené à penser que le carnaval, ce carnaval-là, rend fou (carnaval où ne semble régner que la picole, l'ivresse éthylique débridée, le débordement sexuel). De quel côté se trouve l'auteur qui à aucun moment ne dit – ne fait dire – ce qu'il est en réalité ? (Prenons cent films – ou cent livres, cent toiles aussi bien – ; choisissons-y le moins indigent ; et acclamons-le...)
Il ne faut jamais se perdre de
vue
(je ne me perds jamais de vue)...
Le Site comme un musée, comme
mon musée qui, à terme, contiendrait tout.
Non comme un monument à ma gloire, mais plutôt comme la trace totale d'un
quelqu'un
(mais, au bout du compte, n'est-ce pas la même chose ?).
(Le rêve de La Malédiction
où se mêlent, dans une histoire époustouflante,
S***, L*** et V***. Ahurissant ! Les deux filles d'Edward
III,
roi d'Angleterre (?) au début du XIXe siècle ;
plus la troisième, illégitime, qui sera le départ de tout.
Tout, c'est une histoire échevelée de malédiction qui, se déroulant à la manière
d'un film, voit son dénouement dans la confession de L***. Elle en revient ;
malgré elle, elle en fait partie. Elle sait tout. Éberluée, hallucinée, comme
possédée, elle commence par me raconter, me révéler l'histoire.
Puis s'arrête. Ne peut plus poursuivre : « Je ne peux pas. C'est impossible,
c'est trop abominable... »
Je ne saurai jamais ce qui s'est passé. J'ai encore en moi l'empreinte de ce
rêve puissant qui m'a littéralement assommé au réveil. Mais je ne me souviens
plus de rien, sauf du visage halluciné de L*** et de la troisième fille,
illégitime, d'Edward III,
roi hypothétique et certainement fictif d'Angleterre...
Quel dommage !)
Repas, gâteau au chocolat.
J'ignore le titre de cette toile, mais elle est, de par son sujet, immédiatement reconnaissable. À titre de repères : un personnage recroquevillé dans un recoin obscur de la pièce (coin supérieur gauche) à moitié caché par une tenture rouge derrière laquelle se dissimule un autre personnage ; dans le coin inférieur droit, un siège renversé sous lequel un personnage tente d'extraire la pierre à un autre quidam au faciès livide et épouvanté ; aux environs du centre, une sorte de débile assis dans un panier d'osier, qui porte un gobelet sur la tête et un soufflet à la main... Qui peut me renseigner ?
où nous sommes, des fidèles. En revenant dans le couloir, je remarque une jeune
fille, adolescente, très belle, beauté douce et froide des héroïnes d'Hitchcock.
J'ai du mal à en détacher le regard tandis qu'à mon imitation elle fait les cent
pas dans le couloir. Nous accompagnons Paul chez le frère hôtelier. Il nous
regarde. « Ah, vous êtes les parents ! » Puis regardant Paul : « Il y a un air
de famille. » Je n'ai pas jugé utile de préciser que je n'étais pour rien dans
sa conception... 18 h 15, l'heure de la soupe. Nous laissons là Paul et sortons.
Je pense à Orval, et à la retraite qui a faite Jean-Stéphane l'année dernière,
tandis que Susan ramasse un peu de terre pour son « jardin », puis nous filons
sur Godewaersvelde. L'auberge flamande, tout d'abord, Au Roi du Pot'je
vleesch, où nous achetons des bières ; où nous remarquons la salle de
restaurant, campagnarde, accueillante. Puis l'estaminet Het Blauwershof,
authentique, fief flamand, où l'on boit de la bière au son de musiques folkeuses,
apparemment de toutes contrées. J'y découvre avec plaisir une inconnue : la
Hapkin, fermentation interne, à l'image de la Moinette à laquelle, du reste,
elle ressemble beaucoup. Je découvre de même la tarte à la moutarde... Au
comptoir, Guislain Gouwy, le barde local. Dans le hall d'entrée, dans la seconde
salle, des jeux ancestraux. Partout, des écrits, des emblèmes à la gloire de la
Flandre, incitation à apprendre le néerlandais (oui !), au maintien du
traditionnalisme, du fédéralisme, du régionalisme (oui, mais je pense à ce que
m'avait dit Philippe il y a quelques années, à ses difficultés d'insertion dans
la population de Cassel, mont voisin de la Flandre profonde, au rejet
systématique et borné dont il a été l'objet parce qu'il n'était pas du cru,
parce qu'il était définitivement d'ailleurs, et c'est ce que je ne peux
m'empêcher de voir dans ces placards et sur la figure du patriarche au comptoir,
figure qui orne une affiche dans l'entrée [c'est ainsi que je sais pour le
nom] soit : l'irréductible, l'obstiné et, au bout du compte, peut-être, le
stupide)...
(Qu'est-il ? chanteur ? poète ?)
La notion du « chez nous » et tous les moyens de consolider ses limites...
(Les moines avec l'accent du Nord. Curieux...)