– Eh bien, il y a les papes, bien sûr. Bien sûr et avant tout. Parfait, c’est avant tout chose, les papes. Ce qu’il appelait « sa papologie » – appelle toujours, d’ailleurs, je ne sais pas pourquoi j’emploie l’imparfait... Je n’ai jamais trop su pourquoi cette attirance irrésistible, cette fascination. À cela, il n’a jamais voulu répondre. En tout cas, pas sérieusement. Il s’en est toujours tiré par des pirouettes. Mais je suppose que ç’a à voir avec son caractère profondément mécréant – ce sont toujours les mécréants qui parlent le mieux de la religion ; question de distance, je présume. Et puis ce côté trouble de la représentation divine, cette espèce de pouvoir sans pouvoir, en tout cas de pouvoir non-nommé, abstrait. Occulte, pour être précis, avec tout ce que peut renfermer ce mot. Et puis il y a le faste, le rituel, le protocole ; le cérémonial et l’exubérance ; et cette espèce de dérision et de gratuité de l’ensemble, je veux parler de l’Église toute entière dont il est le potentat – dans son sens premier, c’est-à-dire : pouvoir souverain, de potens, “ puissant ”, d’où potere, “ pouvoir ”, en italien. Car, au fond, à travers les papes, c’est l’Église toute entière qui l’intéresse. L’Église et son décorum, son apparat. L’Église dans ce qu’elle a de profondément féminin. Il parle souvent de la Robe de l’Église – et à bien y regarder, que portent les ecclésiastiques sinon des vêtements féminins ? Comme il dit souvent, citant Baudelaire : « De la féminité de l’Église comme raison de son omnipotence. » Il ne me l’a jamais avoué, ni même dit, simplement, mais je suis sûr que dans son esprit l’Église et la mercerie sont intimement liées...