Édouard
(rejet)
Ce qu’évoque instantanément en moi le prénom Édouard, c’est le visage de l’un de mes cousins. Je ne le vois plus, ne sais ce qu’il est devenu, mais je garde indélébilement sa trace dans ma mémoire sous la forme d’un mot : « éclaireur »...
Il y aurait beaucoup à dire sur lui, tant il était singulier. Édouard était le prototype même du « chiant ». Et qui plus est, du chiant qui le sait, qui se sait l’être. Y avait-il vraiment quelque chose de délibéré, de calculé, de prémédité, de malin dans cette manière qu’il avait de gêner, de contrarier, de surgir toujours au moment le plus inattendu (ou, au contraire, par habitude et connaissance du phénomène, le plus attendu), de contrecarrer les projets, de faire déraper les plans, bref de s’imposer insupportablement, ignominieusement, incompréhensiblement, je ne l’ai jamais su. Mais je ne le pense pas. Pourtant, je sais, je devine que d’une certaine façon, il en était conscient, car souvent il y avait dans ses silences comme un petit défi, une pointe de provocation, et dans ses sourires, une sorte d’attente : celle, peut-être, d’une réaction sur le visage d’autrui ; car, et c’est certainement le plus significatif, il y a eu le « message »...