J'en aurais presque pris du plaisir si malgré tout il n'y avait pas eu un peu de doute, juste un peu, après tout il avait fait une sacrée renverse, la tête la première, le reste qui avait suivi, et tout ça dans le mobilier. Alors peut-être bien qu'il s'était cassé quelque chose, quelque chose que l'on ne saurait pas réparer nous-mêmes - c'est-à-dire moi-même - et alors il allait falloir appeler un toubi, et peut-être même une ambulance, direct l'hôpital où la journée est à je ne sais combien, beaucoup en tout cas, beaucoup trop de toute façon, sans compter les visites à faire et puis après les soins, et Prisca qui n'arrêterait pas de gémir, de se lamenter, d'implorer je ne sais quel dieu personnel qu'elle aurait juste inventé pour l'occasion (un dieu rien que pour lui, l'ahuri), et puis de s'en prendre à tous les saints de la terre, et enfin, en dernier lieu, au bout du compte, quand tout sera épuisé, la terre entière et tous les cieux jusqu'au bout du monde, enfin moi, qui se révélera être le seul et unique responsable... Mais on n'en était pas encore là, on en était juste au début, au moment du ramdam à domicile, la java endiablée des cris et des agitations à laquelle il fallait bien mettre un terme ; et ce terme, j'ai décidé que ce serait moi qui le mettrais ; pas la peine de rameuter tout l'immeuble, et chaque seconde étant la mère de la suivante, et l'habitude aidant, on se fait vite du délire une seconde nature et on s'y plaît tant qu'à la fin on ne peut plus s'arrêter, plus s'imaginer autre chose en guise d'ordinaire...