À chaque fois qu’il pénètre dans la chambre de Gildas, il est instantanément pris d’une sorte de terreur molle – la même, identique, invariable, tout aussi présente et tenace – à la vue des affiches, des posters, des emblèmes, des effigies et autres objets d’adoration qui en tapissent et couvrent les murs, en comblent le moindre espace. Pas tant à cause de la relation évidente qu’elles entretiennent souvent avec une certaine idéologie teutonne récente et pas encore passée de mode – qui ne lui échappe pas, mais dont il se fiche – que du caractère brut d’agression qu’elles constituent à ses yeux, agression visuelle (autant que morale et mentale, c’est fait pour cela) dont il perçoit aisément le ridicule et la superficialité, mais sans pour cela parvenir à la gommer de son esprit, à la réduire en une chose dérisoire et négligeable, ce qu’elle est en définitive. Et pour lui qui pourtant y est venu tant de fois, c’est à chaque fois le même recul instinctif aussitôt passé le seuil, et tout le temps qu’il y restera, généralement longtemps, et bien que tous deux ne se disent pas grand-chose et n’aient guère de point commun, sinon aucun, et à la limite même ils ne s’apprécient pas, ce sera la même sourde agitation qui, jusqu’à ce qu’il la quitte, parte ou, comme souvent, accède à une autre partie de l’appartement, l’envahira et mettra au ralenti toutes les fonctions de son corps pour ne laisser palpiter en silence que la terreur, voire même l’épouvante lorsque, comme aujourd’hui, un élément extérieur viendra précédemment perturber le doux assoupissement, la vaste indolence qu’est son existence de l’aube jusqu’à sa chute définitive dans le sommeil...