Lorsque nous sommes passés à table, l’après-midi touchait à sa fin et nous étions tous plus ou moins éméchés ; mais de cette bonne ivresse qui ajoute du rouge aux joues des femmes et fait crépiter dans leurs pupilles de frêles comètes éphémères de désir. Et c’est bien ce que j’ai vu sur le visage et dans le regard d’Émilie, mais davantage sur toute la peau et dans l’être de Mariette qui, à cet instant où elle se penchait sur moi pour me verser le café, m’a fait pleurer de simple plaisir... Et sans interrompre ton geste, tu m’as regardé, et la manière dont tu as posé les yeux sur moi, m’a tiré davantage de larmes. Christophe et Émilie m’ont fixé avec l’étonnement que l’on peut imaginer, puis, très vite, ils se sont mis à rire, mais doucement, émus et gênés tout à la fois. Puis ils se sont tus, nous ont laissés rivés l’un à l’autre, à ne plus bouger et comme extraits de cet endroit, et il a fallu une exclamation de Christophe pour que se rompe le charme, pour que nous nous rendions compte du débordement sur la nappe du café que durant cette éternité tu n’avais cessé de verser...

Et Mariette dit :

« Mon Dieu ! la nappe est fichue !... »