À l’instar de Sidoine, Albert ne figure pas sur la liste, car, de la même façon que Sidoine est second ouvrier dans l’entreprise de Raymond (Samson étant le premier), donc étranger au milieu estudiantin de Louise et de ses sirènes, Albert est le chauffeur du camion-benne qui, deux fois par semaine, parcourt le quartier, dont la rue V. qu’il remonte à la première heure du petit matin (puisque c’est par elle que débute la tournée) avant de prendre le boulevard G. et la direction d’autres voies limitrophes où les ordures de même s’amoncellent et prolifèrent.

Albert, comme tous les employés du service de voirie qui dessert cette partie de la ville, est libre dès treize heures, et tandis que René (l’un de ses deux coéquipiers habituels qui à l’arrière vont et viennent entre le trottoir et la benne), René dont l’autre fonction, outre celle de charrier et de vider les poubelles, est de presser le gros bouton rouge à main droite qui rythme l’avance et l’arrêt du véhicule (le chauffeur n’est plus dès lors qu’un automate au service d’un voyant lumineux, celui-là même que chaque pression du pouce de René allume dans la cabine et René n’est pas mécontent, en compensation de l’effort et des intempéries auxquels échappe le chauffeur, d’avoir cette position d’importance sur lui qui, littéralement, lui obéit au doigt et à l’œil), tandis que René donc vaque à sa famille et à son bricolage, Albert prépare ses affaires pour un samedi tout entier à passer dans son petit bungalow de pêche aux abords d’un étang tranquille à l’extrême limite de la banlieue proche...