Certainement pas Nina et Sébastien, et bien qu’ils soient proches (tant par la distance – puisqu’ils partagent le même toit –, que par le sang – puisqu’ils partagent la même mère) et lucides et perspicaces (mais qui ne le serait pas, sachant que c’est précisément à midi que pour la dernière fois s’est effondré leur frère ?), et curieux et intelligents (mais qu’ont à voir curiosité et intelligence avec la fracture définitive des sens et la rupture d’avec ce monde dont ils font irrémédiablement partie et qui les laissera à jamais ignorants de celui que leur mère désormais habite ?)

Midi est l’heure à laquelle elle s’éveille ; onze heures est celle à laquelle elle se réveille, c’est-à-dire ouvre les yeux, sort du sommeil. Pourquoi onze heures, précisément ? Nina ne le sait pas, elle qui l’aide à se lever, la conduit à la salle de bains et l’aide à se laver et à s’habiller, puis la guide jusqu’à la cuisine où elle l’aide et la force à manger, tous les jours, invariablement. Pas davantage Sébastien qui depuis longtemps a cessé de se poser la question et, de toute manière, n’est jamais à la maison, n’a l’esprit qu’à Marcelle et à son violon, ou plus précisément à son violon et à Marcelle, car Marcelle ne joue d’aucun instrument et Sébastien se plaît à croire que c’est tout de même au violon qu’il accorderait sa préférence...