Madame, monsieur et le fils (il avait fait une apparition lorsque nous y étions allés, un adolescent à ressorts vif, frisé et maigrichon qui avait traversé la pièce avec un large sourire et le regard posé sur moi – moi et pas Éléonore, ou nous deux –, et j’avais soutenu son regard jusqu’à ce qu’il disparaisse) sont venus livrer la méridienne. Puis nous avons pris la route pour Brico ; j’y ai acheté des chevilles et un pot de peinture (pourquoi un petit plutôt qu’un gros, je n’en aurai pas assez) ; de là, Emmaüs (quelle belle vue sur la ville), puis l’antiquaire d’Audreuse, cette fois, ouvert (quelles belles vues sur la mer déchainée). Une commode me tentait, elle m’a dissuadé, aurait souhaité que je prenne un fauteuil « américain » pour mon jour de naissance (j’ai oublié le nom exact, avec les accoudoirs arrondis et très hauts, j’avais l’impression d’avoir douze ans dedans). Du reste, elle ne cessait de me demander ce que je voulais comme cadeaux, chez Emmaüs tout d’abord – des chaussures, dont une paire de Cardin (cent soixante-dix euros au lieu de trois cents quarante, je trouve tout de même qu’ils exagèrent) qui m’auraient peut-être plu si elles avaient été à ma pointure –, puis chez l’antiquaire. Mais auparavant, dans la voiture, nous avions parlé de livres, et elle m’avait proposé de regarder chez Emmaüs. Je lui avais dit : « pourquoi pas un livre, mais tant qu’à faire autant que ça en soit un que je désirerais plutôt que je farfouille pour en trouver un au hasard », et m’était venu à l’esprit le Houellebecq que j’avais hésité à acheter la fois où j’étais allé à la librairie du bas de la rue avec Sosthène, puis Congo d’un Belge dont François Busnel avait parlé à La petite librairie (j’avais pensé à Sosthène et ce qu’il m’avait dit du Congo belge le jour où nous étions allés à Tervuren et il n’est pas impossible qu’il m’ait parlé de ce livre-là en particulier). Mais je n’en avais pas relevé le nom ; la seule trace était qu’il s’agissait d’un nom flamand à particule. En même temps, avais-je envie, vraiment envie de ces livres ? « Mais alors, il faut que tu ailles les acheter à la librairie du bas de la rue. » « Je n’aurai pas le temps et demain ce sera fermé à cause du lockdown. » « Alors, allons-y... »