Mais ce n'est pas pour cette
dernière raison que M. Ange retiendra Jonas. Mais pour la remarquable référence
qu'il fait, par l'intermédiaire du poisson, à Tiamat, déesse de la mer dans les
Cosmogonies Babyloniennes, Tiamat qui est à l'origine de tous les dieux et qui
leur donna naissance.
Ces Cosmogonies parlent d'une
révolte antérieure au Chaos, menée par l'un de ces dieux, et rapportée dans le
Livre de Job. Et ces quelques lignes de Job attribuent la victoire, à ce dieu
sur cette déesse de la mer, ce dieu-ci, justement, celui que servent ces papes.
Ce qui permet à M. Ange, le
raisonnement suivant : si ce dieu-là est présent aujourd'hui, c'est qu'il y eut
un combat, avec cette déesse, au cours duquel il serait sorti simplement
vainqueur. On peut alors émettre l'hypothèse que s'il advenait un autre combat,
avec un autre dieu, ce serait un combat, duquel rien n'empêche vraiment de
penser qu'il pourrait cette fois, sortir vaincu.
Jonas nous révèle tout
simplement que celui qu'on nomme l'Éternel dans un livre, ne l'est plus
forcément dans un autre livre. Qu'il existe toujours une référence d'avant La
Référence. Que le pouvoir n'est inscrit que dans ces Ténèbres lancées sur les
mondes que l'on ne doit pas voir.
Le monde de l'Index, par
exemple, où se trouve reléguée la Divine Comédie de Dante.
C'est pourquoi ce sera juste en
face du dernier tableau, le 9e, celui situé au-dessus de l'autel, là
où l'on voit Dieu séparant la Lumière de ses Ténèbres, que M. Ange placera
Jonas. Exactement sur la clef de voûte faisant la jonction entre le plafond de
la chapelle et le mur de l'autel, où se trouve encore la fresque frontale de
l'Assomption de la Vierge du Perugino.
Et lui Jonas, celui qu'on nomme
le petit prophète, celui qui écrivit le plus court texte de la Bible, M. Ange en
fera un géant. Il en fera le plus grand par la taille de tous les personnages de
la voûte !
Ce sera pourtant un géant effrayé, et semblant vouloir fuir le déroulement des événement vers lesquels il est tourné, ces événements issus de la création divine.