La création d'Ève, c'est une étape très importante, puisque c'est le moment précis, juste avant la Parole. Adam dort encore, anesthésié à l'occasion de l'heureux événement. Et lorsqu'il se réveillera, ce sera pour Adam et pour Ève, la naissance d'un concept : celui de l'Autre. Et pour eux, cet Autre est encore unique.

C'est là le point sur lequel M. Ange bâtira tout son parcours.

Car si l'on cherche dans quelle circonstance une telle situation, aussi unique et exceptionnelle que celle-ci a pu se reproduire, plus tard, une nouvelle fois, maintenant que cette terre est peuplée d'êtres innombrables, eh bien ! pour M. Ange, ce sera chaque fois que l'un de ces êtres aura fait d'un autre être, son Élu. La circonstance amoureuse est effectivement la seule qu'il retiendra pour rappeler cet Âge d'Or, le Paradis.

Là M. Ange trouve la liaison avec un auteur qu'il connaît bien, et à une œuvre littéraire, dont justement, l'auteur fit de cet Élu, le Livre de sa vie. Cet homme, c'est Dante. M. Ange en a très particulièrement abordé l'œuvre grâce au cadeau que lui fit l'un de ses admirateurs, Sandro Botticelli, le cadeau d'un peintre.

 Mais un peintre dont l'œuvre plus discrète fut une traduction sérielle et décodée de la Divine Comédie. Mais aussi et surtout, il fut l'auteur d'un Traité, celui-là même qu'il offrit à M. Ange. Un Traité par lequel il fut le seul de son  époque, à avoir mis le doigt sur cet aspect de l'œuvre de Dante, à savoir pas tant sur les écrits eux-mêmes, mais sur son acte d'écriture.

Botticelli nous apprend que chez Dante « le texte est un seul corps, en état de transformation continue, de telle sorte qu'un passage n'est jamais que l'annonce, la réplique, l'annulation ou l'achèvement d'un autre ».