C’est la nuit et je suis à ma place à achever The Moon and Six Pence. C’est une belle histoire, c’est bien écrit, je suis pris ; en même temps je ne peux m’empêcher de penser aux croquignols qui, régulièrement, de page en page, me passent sous les yeux. Je ne sais plus si je suis entré dans le détail ou non, mais voici comment ils se présentent. La majorité d’entre eux, comme c’est souvent le cas dans des livres en langue originale lus par un étranger, sont soulignés. Mais ils ne le sont pas tous de la même manière. En outre, certains d’entre eux, très peu, sont accompagnés d’un point d’interrogation, et un ou deux (un seul, si mes souvenirs sont bons) sont suivis de la traduction en français. Enfin, apparaît régulièrement en fin de paragraphe, généralement, une petite croix. Le tout est au crayon gris, comme il se doit. Tout cela m’intrigue beaucoup, notamment la manière différente de souligner les mots. En effet, la majorité d’entre eux sont franchement et complètement soulignés  d’autres, par contre, le sont à peine, et à bien y regarder, ils ne concernent que deux ou trois lettres d’un mot, voire, parfois, une seule ; enfin, je ne suis pas sûr que le souligné soit le signe de l’incompréhension du lecteur ; bon nombre d’entre eux sont des mots relativement rares (un certain nombre me sont inconnus) ou peu fréquents, mais d’autres ne le sont pas du tout et peuvent laisser penser que ce lecteur n’a qu’une faible connaissance de l’anglais. Dans ce cas, pourquoi seuls certains d’entre eux ont la faveur d’un point d’interrogation ? De là, me vient l’envie d’une étude, à savoir : à quoi correspond exactement ce mode de marquage ? Et ce qui m’intrigue peut-être davantage, c’est la raison pour laquelle il (ou elle) ne souligne que certaines lettres d’un mot (parfois il s’agit d’un mot déjà franchement souligné auparavant auquel, à la deuxième ou troisième occurrence, il n’accorde qu’un léger trait ne distinguant que des lettres). Il me reste à peine vingt pages, et je pense que je ne vais pas attendre plus longtemps pour me lancer dans le relevé de ce marquage insolite (n’ai-je donc rien d’autre à faire ?)... De l’idée de rédiger un texte à l’aide de tous ces mots ; chercher l’identité de ce lecteur lectrice, ou, pour le moins, essayer de le cerner ; imaginer qu’il s’agit d’un message secret. Etc...