Je l’ai bien entamé, lis avec un certain plaisir, malgré les difficultés liées au style de l’époque, au vocabulaire essentiellement marin. J’en suis à la page 150 et Ahab n’est pas encore arrivé. Le narrateur est le jeune Ismaël, il n’épargne aucun détail. C’est long et lent comme un film d’aventures où les choses tout doucement s’installent, et tout aussi prenant. Les films d’aventure sont en grande majorité tirés de livres d’aventures, mais je n’ai que la référence des films. Je lis donc ce texte comme un film, avec un très vague souvenir de celui-ci et, bien sûr, l’image de Gregory Peck dans le rôle d’Ahab ou Achab. En outre, suite à l’article à l’origine de ma décision, je ne peux, évidemment, faire autrement que d’y chercher toute allusion à caractère homosexuel. Est-ce un bien ou non ? J’ai fait ma première lecture de La recherche en ignorant que Proust était homosexuel et je suis incapable de dire si la deuxième lecture, a été différente de la première, ou plus exactement en quoi elle a été différente. Je ne saurai jamais si une première lecture de Moby Dick dans l’ignorance d’une quelconque allusion homosexuelle aurait été différente de celle-ci, si les premiers contacts entre Ismaël et Queequeg m’auraient paru suspects ou non. Je pense que j’aurais préféré l’innocence, l’ignorance afin que les faits se révèlent d’eux-mêmes… Ce texte a été écrit il y a cent cinquante ans et est entré dans l’histoire de la littérature et de celle du monde. Je me dis que c’était encore l’époque où il était encore possible de raconter de grandes histoires sur des thèmes qui touchaient l’universalité. Tout était à faire. Est-ce encore possible aujourd’hui ? Quel est le texte aujourd’hui qui sera le Moby Dick ou le Lord Jim de demain ?...
1er octobre 2006