Bloc, notes en retard d'il y a quelques jours, les premières au sujet de Miller, suscitées par la lecture de ses lettres à Anaïs Nin : « Je n'ai pas de souvenir de mes lectures d'enfance, hormis Les Compagnons de la Croix-Rousse. Je sais que j'étais inscrit – à quel âge ? treize ans, quatorze ? – à la Bibliothèque municipale de Rance ; je me revois m'y rendre, dernier étage, et y choisir des livres. Mais quels livres ? Je ne m'en souviens pas (ou au moins d'un : Le Comte de Monte Christo). Et puis il y a eu une période de rupture ; de négation, de réaction ; c'est-à-dire réagir contre le « système manipulateur et castrateur » dont la première arme est le langage, donc l'écrit. En ayant pris conscience de cela et croyant dur comme fer à la valeur absolu du moi (déjà), de l'individu qui pour être doit s'écarter de la multitude (et ainsi pensais-je détenir les clefs de mon avenir), j'ai pris la décision un jour de ne plus lire. Abolir donc toute surface imprimée de ma vue, le livre en étant la plus importante manifestation. Alors, je n'ai plus lu ; ai refusé, proscrit toute forme de lecture : si je dois être, je le serai sans l'aide de quiconque, sans l'influence de quoi que ce soit, et surtout pas des écrivains... »
 

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