J’ai refermé, repris la suite de la nouvelle au matin. Les images de cette mort détaillée, puis celle de son épouse ne m’ont pas marqué outre mesure ; pas autant en tout cas que ce qui les unissait à ce moment-là, au nom de l’amour davantage qu’au nom de l’honneur. Elle est en face de lui, agenouillée, assiste à son éventration, est aspergée de son sang ; est impassible, au nom de l’amour et du « code » qui les unit. Puis, avec la même tranquillité, elle se donne la mort près du cadavre de son mari. Tout cela semble extrêmement naturel, du moins, je peux le présumer, pour un Japonais ; ou du moins, tout laisse à penser qu’un Japonais peut trouver cela naturel, allant de soi. D’un autre côté, pourquoi Mishima, en tant que Japonais, et lui-même qui finira de cette façon, éprouve-t-il le « besoin » de détailler cette double mort ? Pourquoi, tout simplement, l’écrit-il ? Et pourquoi ce titre : « Patriotisme » ? Mais est-ce réellement ce mot-là ? Il est précisé que la traduction est faite depuis l’anglais et non du japonais : Mishima s’est opposé à ce que la traduction française soit faite à partir du japonais. C’est très étrange. Il n’est pas dit pour quelle raison et il me semble qu’il s’agit là d’un point très important. Je parlais justement du problème de la traduction avec Sosthène cette après-midi, du russe, en l’occurrence. Je n’ai pas pensé à lui parler du japonais. Mishima a-t-il pensé que la traduction serait plus juste par l’intermédiaire d’une autre langue, en l’occurrence l’anglais ?