Je suis exténué. Il fait gris, froid, il bruine. Hier soir, j’ai regardé True Grit des frères Coen ; je ne sais absolument pas quoi en dire. Puis je suis monté, courrier, fichiers, copies et lit avec Martin Eden. Ça n’a pas duré longtemps, évidemment ; je ferais peut-être bien de lire plus tôt (pas au lit, en tout cas) et de lui consacrer un peu plus de temps, d’autant que je suis curieux de savoir comme son histoire va s’achever… Il me reste une vingtaine de pages (mais qui en valent bien soixante ou soixante-dix dans une édition normale). Je m’étais demandé pour quelle raison amazon s’embêtait à faire de l’impression alors que le texte est disponible gratuitement sur Kindle, et même sur le réseau, non ? Je viens de vérifier ; j’ai trouvé l’intégrale en français ; encore qu’intégrale soit un mensonge puisque cette édition numérique, d’un traducteur autre que celui de la version que je possède, signale qu’un chapitre manque : le XXXVI. C'est celui où Brissenden fait entrer Martin Eden dans le cercle des intellectuels, « the real dirt » tel qu’il le définit. Pourquoi ce chapitre ? À cause des idées qui y sont développées ? Ça me semble d'autant plus singulier que Martin Eden y fait référence par la suite et je me demande comment le traducteur s’est débrouillé (il ne va pas m'être facile de retrouver ce passage)... Je me suis amusé à faire des comparaisons. Cette traduction est de Claude Cendrée (sans autre indication), celle que je possède de Francis Kerline ; je n’ai rien trouvé sur Jacques Cendrée, mais Francis Kerline est contemporain ; la première doit donc être d'époque (alors que j'avais eu l'impression de l'inverse avec Kerline au vu de la formulation, du vocabulaire – mais comment un traducteur actuel peut-il essaimer son texte d'imparfaits du subjonctif, même au nom d'une certaine fidélité au ton de l'original, à une certaine ampoule de l'écriture de London ?). Je ne retiendrai que la première phrase. Cendrée : « Arthur ouvrit la porte avec son passe-partout et entra suivi d’un jeune homme qui se découvrit d’un geste gauche. » Kerline : « Le quidam ouvrit la porte avec une clé et entra, suivi d’une jeune gaillard qui retira sa casquette avec gaucherie. » L’original : « The one opened the door with a latch-key and went in, followed by a young fellow who awkwardly removed his cap. » Qui donne, littéralement : « L’homme ouvrit la porte avec une clef et entra, suivi par un jeune gars qui retira gauchement sa casquette. » Qui est Arthur, d’où sort le passe-partout, où est passée la casquette, et quel ce gaillard qui n’est qu’un gars ?

 

7 mars 2013