Pourquoi celui-là plutôt qu’un autre ? Parce qu’il figurait dans une page consacrée à la littérature scandinave et au polar en particulier qui, à en croire l’auteur de l’article (mais on sait ce que valent les auteurs d’articles) aurait sa spécificité, et j’ai dû me dire à ce moment-là : qu’est-ce qu’un Scandinave peut bien écrire en matière de polar ? Mais en vérité, il ne s’agissait pas de celui-ci, mais du troisième volet d’une trilogie, ce que m’a appris Lise lorsque je l’ai commandé. C’est elle qui m’a conseillé de commencer par le début. Alors, soit, commandons le premier. Je suis allé le chercher il y a quelques jours et j’ai été un peu stupéfait face à la taille de ce livre que j’imaginais, comme la majorité des polars qui se respectent, du format d’un livre de poche. Il n’en est rien. C’est un grand et gros format de six cents pages. Depuis, il se trouvait sur mon bureau à me narguer de sa masse, et si je m’en suis saisi hier, alors qu’il y en a tant et tant qui attendent d’être achevés, tant d’autres d’être entamés, c’est, je pense, pour m’en débarrasser. C’est ainsi que je l’ai entamé hier dans la nuit, au lit. Dès la première page, j’ai pensé le refermer. Je l’ai dit, c’est mal écrit, mais aussi cela s’annonçait d’une veine on ne pouvait plus classique. J’ai poursuivi, quelques pages qui n’ont fait que confirmer cette règle fondamentale : un traducteur n’est pas un écrivain, combien même il y en ait deux, comme c’est le cas ici, et un métier est à inventer : correcteur de traducteur. J’ai poursuivi pourtant, en me disant que dans le fond, ça pouvait être distrayant, pourquoi pas après tout, un peu de convenu de temps à autre. Je m’y suis remis ce midi et les choses allant, j’en ai avalé cinq cents pages en ne m’étant permis des pauses que : pour consulter le courrier sur l'ordinateur, déboucher le tuyau d’évacuation de la douche, repasser les sept chemises en retard, préparer le repas, manger et sortir le chien… Reste à savoir pourquoi cette exception notable ? C’est extrêmement mal écrit, mais suffisamment prenant pour faire oublier les bourdes, maladresses, fautes, incorrections des deux traducteurs qui, sans nul doute, sont directement passés de la machine-outil à la littérature sans que personne ne se soit avisé de les informer qu’il ne s’agissait pas tout à fait de la même chose. Et puis, je pense qu’y entre une part d’expérience, celle justement de ne rien faire d’autre que lire, quel que soit l’objet et l’intérêt de cette lecture (et celle-ci n’en aura pas beaucoup dans la mesure où c’est conventionnel éprouvé, convenu et qu’au bout du compte j’aurai lu un polar qui ne sera pas différent d’un autre, mais qui sera suffisamment bien « ficelé » pour que le piège fonctionne), et, peut-être, voir l’émail à Innocent, de m’octroyer une journée de pur « délassement », ce qui, à bien y regarder, est, dans mon existence, tout de même une rareté.

 

11 novembre 2007