retour

 

 

 

1998

 

*

 

 

17 juillet

 

Je n’ai pas la tête à l’écriture. Thierry m’a fait part d’un projet de tour de chant avec Marc et Christelle, et sans doute un ou deux autres instrumentistes. Il m’a proposé le clavier pour deux morceaux et la guitare pour un troisième ; il voudrait aussi inclure le Vaisseaux de Fauré et le Wolf*, avec moi au clavier électrique. « Électrique ? Tu es fou ? »

 

* un autre, Wann die Hähne kräne (note du 19 octobre 2021)

 

 

17 septembre

 

Tout doucement, les choses reprennent leur cours : appel d’Apollos pour la reprise des cours latin/grec début octobre, puis de Doriane pour les cours à Marian...

 

 

23 septembre

 

« Satie est fou », m’a dit Marian alors que je lui jouais un extrait d’Avant-dernières pensées...

 

 

27 septembre

 

Je viens d’allumer ma première cigarette en me demandant à quoi je pourrais l’occuper. J’ai d’abord ouvert mon classeur de grec pour le refermer aussitôt ; ce n’était pas le moment. Puis j’ai pensé lire, mais je peux lire sans fumer. Alors, je me rabats sur le journal, « occupation » qui nécessite le tabac. Je profite donc de cette cigarette pour ouvrir le journal ; que cette fumée ne s’en aille pas au gré de mes pensées seules (qui n’ont heureusement pas besoin de la cigarette pour se développer)... Je pensais à l’instant à la cassette que Marek m’a offerte, une soirée Thema consacrée au journal intime. Il y avait deux reportages. J’ai regardé le premier : une demi-douzaine de personnes qui font du journal une pratique quotidienne, âges et origines divers. Rien ne m’a vraiment frappé, si ce n’est cette fille qui tenait la courbe de ses sentiments, de ses émotions ; courbe émotionnelle, en quelque sorte, qui va du bonheur au désespoir en passant par le point zéro, position neutre correspondant à la « routine ». J’ai trouvé cela très beau... Il y avait aussi un viticulteur âgé qui écrit et conserve tout depuis trente ou quarante ans. Il dit qu’il relit souvent et que de relire des commentaires datant de vingt ou trente ans, au sujet d’un voyage, par exemple, ce n’est pas revivre les moments auxquels ces commentaires se rapportent, mais bien les vivre. Ce n’est pas une vision du passé, ou un retour dans le passé, mais bien un moment présent qu’il vit entièrement comme s’il était neuf, comme s’il venait de l’écrire. Un frère, en somme…

 

 

2 octobre

 

Après les envois du dernier livret, je suis passé chez Thierry. C’est la rentrée. Retrouvailles. Il m’a fait écouter les pièces dont il veut me confier les parties piano. Il y en a quatre, simples, voire faciles. J’ai accepté, même, et il le sait, si je suis loin de sa musique, et même très loin. Son tour de chant est prévu pour mars, au siège d’une association à Roubaix. Jacques en sera. J’ai essayé de le dissuader d’inclure les pièces de Wolf et de Fauré dans le répertoire ; je ne vois pas ces deux pièces jouées sur un clavier électrique (sacrilège) et je pense qu’elles seraient particulièrement déplacées dans un tour de chant dont il est le compositeur et l’interprète. Puis je suis allé chez Marian. J’ai l’impression qu’il a moins d’allant qu’avant les vacances ; j’ai l’impression qu’il se lasse...

 

 

17 décembre

 

Répétition chez Marc pour le tour de chant de Thierry. J’ai la charge de trois* petites pièces simples sur clavier électrique ; j’ai eu du mal à m’y adapter (je pense qu’il a renoncé à Wolf et Fauré)...

 

* trois ? n’était-ce pas quatre ? (note du 19 octobre 2021)

 

 

29 décembre

 

Marian était absent. C’est Antek, à moitié endormi, qui m’a ouvert : il est seul, Doriane et les enfants sont à la mer. Nous avons bavardé une petite heure autour d’un thé. Il va vendre une toile à une société bancaire. Je lui ai parlé de La Collection qui périclite, du site que je viens de créer et qui m’a semblé, alors que je lui en parlais, parfaitement ridicule. Il m’a demandé ce qu’il en était des abonnements, en oubliant sans douter à ce moment qu’il s’était lui-même retiré...

 

 

*

 

1999

 

*

 

 

13 janvier

 

J’ai pris la décision de réaliser moi-même les publications de la Rue : photocopies et reliures à la main. Léo m’y aidera. Reste à en évaluer le coût et à trouver le financement sans demande extérieure (solution : la souscription)...

 

 

15 janvier

 

Jacques m’avait demandé une composition pour son orgue de Barbarie, je viens de l’achever. De temps à autre, il me le rappelait ; je disais oui, y pensais, puis oubliais ; je pense que je n’ai pas la tête à la musique en ce moment – la mienne, en tout cas. Puis, la semaine dernière, Fanny m’a rapporté qu’il lui en avait parlé. Je m’étais alors dit qu’il comptait dessus un peu plus que je ne le pensais et j’avais donc décidé de m’y mettre. Je n’avais pas d’idée précise et avais pensé à toutes les compositions qui, pour des raisons diverses, n’ont pas été concrétisées, dont 95, écrit pour célébrer l’année, à l’époque où j’avais rencontré Valérie. Il m’avait semblé que ce type de « rengaine » à figure de valse triste pouvait tout à fait convenir au son et au caractère de l’orgue. C’est fait. Je n’ai plus qu’à la lui soumettre...

 

 

19 février

 

Hier, répétition chez Marc pour le tour de chant de Thierry. Groupe au grand complet : un certain Alain, sax, clarinette ; Marc au trombone ; le fils de Jaouen à la guitare ; Jacques, orgue de barbarie et voix ; Thierry, chant, guitare ; et enfin moi, clavier simpliste. Le groupe s’appelle Les belles endormies... Le filage m’a donné l’occasion d’entendre la totalité du répertoire...

 

 

19 avril

 

Ça s’est passé au rez-de-chaussée des locaux d’une association à Roubaix. Cela faisait vingt-trois ans que je n’avais pas joué en groupe, ne m’étais pas produit musicalement sur une scène. C’était aussi la première fois que je tenais le clavier, piano, mon second instrument, électrique en l’occurrence – et ironie, le guitariste jouait sur ma propre guitare, la fameuse Custom, qui n’avait pas pris l’air face à un public depuis cette époque... Thierry s’inscrit dans la lignée d’une certaine tradition de la chanson française : Higelin, Couture, Lafaille. C’est un excellent chanteur, il est musicien, de sensibilité et de cœur ; il est généreux et offert. Je l’estime, comme j’estime son travail, même si je ne l’aime pas vraiment (c’est du travail que je parle). Il le sait, je le lui ai dit. Lorsqu’il m’avait proposé de l’accompagner au clavier, j’avais immédiatement refusé : je ne suis pas pianiste, pas fiable techniquement. Il avait insisté, j’avais fini par accepter pour une seule représentation. Il m’avait remis les partitions pour clavier. Leur simplicité m’avait donné un peu de confiance ; m’avait aussi fait estimer que je pouvais bouder, durant un temps, les premières répétitions. Puis j’y étais apparu, un cycle régulier s’était mis en route et je m’étais aperçu que j’y prenais un plaisir inattendu, plaisir de jouer avec d’autres, par-delà ce qui est joué. Puis, lors de la première répétition générale, j’avais été surpris par la qualité de certaines compositions que je découvrais et m’étais trouvé fâché de n’avoir qu’un si petit rôle dans l’ensemble – quatre petites pièces sur la quinzaine de chansons du répertoire – d’autant que guitare et clavier ne jouaient jamais ensemble, j’aurais très bien pu aussi tenir la guitare. Bref, la petite place qui jusqu’alors avait été pour moi une aubaine est devenue une frustration. J’ai ressenti cette frustration hier, celle de n’être pas davantage intégré à l’ensemble. Mais j’ai ressenti aussi ce grand plaisir de jouer, de participer à un ensemble, plaisir de pratiquer la musique quel qu’en soit le type. Que valent tous les discours et toutes les positions sur la musique face au simple plaisir de la pratiquer ?

Il y a deux ou trois choses que je n’aime pas, trouve ordinaires. Mais il y en a dautres qui sont véritablement des réussites et m’émeuvent considérablement. J’ai ressenti cela aussi hier : un considérable émoi...

Thierry va partir en quête de contrats. J’en serai... (Pendant ce temps, ma musique attend, en particulier le Journal musical…)

 

 

22 avril

 

Hier, c’était le jour de naissance de Valérie, seconde V. Hier, au cours d’une soirée vidéo, je suis tombé sur V., j’en suis encore remué…

 

 

19 mai

 

Les progrès de Marian sont étonnants. Dommage qu’il boude toujours la lecture, ne se fie qu’à sa mémoire qui capte les mouvements de mes doigts. Dois-je le forcer ? Je n’en ai pas envie. Je veux que le cours reste léger, soit davantage une heure de jeu que de contraintes. Il s’y mettra petit à petit...

 

 

21 mai

 

Thierry m’a fait écouter l’enregistrement du concert. Nous avons parlé de partitions pour clavier pour quelques unes de ses chansons...

 

 

7 juin

 

Hier était la Fête-Dieu (il y a un an, pour la même fête, un concert d’un autre type se donnait au 10 de la rue Manuel). La formation comprenait Marc au trombone et au clavier, Thierry à la guitare et à la batterie, Cyril à l’alto, Jacques à l’orgue et au chant, Christelle à la flûte et au chant. Le répertoire est exclusivement fait de chansons françaises, dans la plus pure tradition du genre, c’est-à-dire des Feuilles mortes jusqu’aux Copains d’abord, en passant par La Belle de Cadix. C’était l’anniversaire de mariage des parents de Thierry, ça s’est passé dans leur propre maison, investie pour l’occasion par une vingtaine de personnes toutes réunies dans le séjour, orchestre y compris. Si j’ajoute la manière dont nous avons été reçus – comme des princes, à la polonaise, évidemment : profusion de pâtisseries et d’alcool maison l’après-midi, charcuterie avec l’apéritif le soir –, je peux dire que ça a vraiment été une journée exceptionnelle...

J’ai été étonné d’y voir Cyril ; j’ignorais qu’il était musicien et faisait partie du groupe, et était amateur de « vieilles » chansons françaises, connaisseur éclairé de Damia, Fréhel et Brassens dont il sait tout le répertoire et qu’il chante à la demande d’une voix grondante en s’accompagnant à la guitare. Il a vingt ans.

(Marc est décidément un excellent tromboniste…)

 

 

3 août

 

C’est à cette date que figure la relation de la fête du 14 juin 1998, c’est-à-dire plus d’un an après ; sans commentaires… (note du 17 octobre 2021)

 

 

2 novembre

 

Antek m’a longuement parlé de Marian ; il est époustouflé par ses progrès. À plusieurs reprises, il m’a remercié, comme si j’y étais pour quelque chose...

 

 

17 novembre

 

Marian a pleuré, trois fois pendant le cours. Cela a commencé lorsque je lui faisais faire un peu de solfège (il s’y refuse toujours) ; il m’a dit qu’il était fatigué, j’ai essayé d’en savoir davantage, lui ai proposé que l’on arrête et fasse un ancien quatre-mains. Il a accepté, mais au bout de deux minutes, il s’est de nouveau mis à pleurer. Il ne m’a pas répondu, sanglotait doucement, en silence. Puis il s’est montré disposé à reprendre la Sonate en B. Doriane est arrivée et c’est devant elle qu’il a pleuré pour la troisième fois. Elle ne comprenait pas, mais j’ai l’impression que c’est dû à son blocage face au solfège. Cela fait plusieurs semaines que j’essaie de le faire sauter, et il est possible que j’aie trop insisté, ou qu’il se trouve face à une tâche qui lui semble insurmontable et à laquelle il sait qu’il ne peut échapper. Comment faire pour lui faire passer ce cap, pour lui faire accepter la nécessité de la lecture ? Il doit bien s’en rendre compte, et a dû s’en rendre compte lorsqu’il s’est vu incapable de rejouer En plus, qu’il savait par cœur et qu’avec le temps, bien sûr, il a oublié. (La deuxième fois qu’il a pleuré, c’est au moment où je lui ai montré la partition et ai commencé à lui faire lire les notes…)

 

 

24 novembre

 

J’ai appelé Valérie, nous nous voyons mardi, puis Anne et Olivier, répondeur...

 

 

29 novembre

 

Il y avait une fête chez Guenièvre, pas mal de visages inconnus, dont un qui se trouvait être l’un des lecteurs de ma série promotionnelle de l’an dernier. Il avait regretté l’arrêt des envois, était intéressé. Il m’a parlé de Philippe Lejeune, universitaire et auteur de quelques livres, féru de « journaux » intimes. J’avais noté son nom dans un dossier du Magazine Littéraire qui leur était consacré, avais eu dans l’idée de le contacter, puis avais renoncé. Il m’a conseillé de le faire, m’a également promis de s’abonner*... Doriane, Léo, Anouchka et moi avons parlé de la nouvelle année. Les choses se précisent sans pourtant s’affirmer. Il serait question d’une fête de deux jours qui couvrirait le 30 et 31 décembre. Reste à définir le lieu...

 

 

* il ne l’a pas fait (note du 22 octobre 2021)

 

 

30 novembre

 

Je reviens de chez Valérie. C’était la première fois, depuis juin de l’année dernière, que je remettais les pieds à l’appartement. Je m’attendais à un choc quelconque, il n’en a rien été ; ce n’est plus « chez moi » et j’avoue que je n’ai rien retrouvé de mes trois années passées là : pas d’émotion particulière, ni de souvenirs immédiats... J’ai été frappé par sa petitesse ; mais il est vrai qu’ils y vivent à cinq, tandis que j’y étais seul, et c’est surchargé de mobilier. Il est un fait aussi que je me suis accoutumé à l’espace de la maison d’Éléonore ; j’ai fait remarquer à Valérie que mon bureau du grenier était aussi vaste que l’appartement et je me suis dit qu’il me serait désormais difficile de revenir en arrière, de retrouver un espace moindre dans lequel je me sentirais confiné... Valérie n’a pas changé, a une mine superbe, est toujours aussi gracieuse... Un an et demi que nous ne nous étions vu. Elle travaille toujours autant, cherche toujours la stabilité d’un orchestre. J’avais acheté des pâtisseries, elle a fait du thé. J’en ai beaucoup bu et en ai très vite senti les effets sur moi. C’est sans doute ce qui explique l’état dans lequel je me suis trouvé face au piano lorsque j’ai voulu lui faire entendre mon interprétation des préludes de Bach que je travaille en ce moment. Elle s’est limitée à trois mesures, pas une de plus, il m’a été impossible d’aller au-delà ; blocage complet, comme si je m’étais trouvé pour la première fois de ma vie face à un clavier. Le phénomène n’est pas rare, j’y suis, d’une certaine manière, accoutumé, mais il arrive toujours un moment, au bout de trois ou quatre essais, où ça passe, où les doigts et l’esprit se dégèlent et trouvent leur chemin. Pas là. Ça a été une horreur complète et je me suis fait l’effet d’un demeuré. Que se passe-t-il à ces moments-là ? Qu’est-ce qui fait que tout à coup une partition parfaitement sue soit gommée, brouillée, effacée ? La moindre goutte d’alcool a cet effet-là sur moi : la perte totale des moyens, l’annihilation, la paralysie des doigts et de la pensée. Était-ce le thé ? Toujours est-il que j’ai rarement ressenti une plus grande honte, une honte qui me tient toujours... À la honte sont liées la peur et l’incompréhension. Je ne comprends pas et, à chaque fois, j’ai peur, peur que ce soit irrémédiable, peur que tout à coup je ne sais quelle connexion lâche et me plonge dans le désordre mental...

Je lui ai parlé de l’album, elle a accepté. Nous nous revoyons la semaine prochaine avec mon appareil…*

 

* en début dannée, j’avais trouvé un appareil photo chez Éléonore, un instamatic qui n’appartenait à personne (il y avait beaucoup de choses dans cette maison qui n’appartenaient à personne). M’était venu à l’esprit – je ne sais comment la connexion s’était faite – que je ne possédais aucune photo des personnes qui m’étaient proches ; m’était alors venue l’idée de constituer un album qui les regrouperait toutes (« papier », à l’origine, il s’est ensuite doublé d’une version numérique à l’usage seul des intéressés), amis, amies, ou simplement toute personne qui m’était chère, était un élément important de ma vie. J’avais commencé en janvier et il devait durer une année – il aurait donc été une sorte de Journal pictural. Valérie devait naturellement en faire partie… (À la fin de l’année, il n’était pas achevé ; d’une part, je n’avais pas réussi à y faire entrer toutes les personnes prévues, d’autre part, j’avais oublié que d’autres viendraient ensuite et qu’elles devraient aussi y avoir leur place ? Bref, il n’aurait pas de fin, ou plus exactement sa fin coïnciderait avec la mienne – c’est donc bien un journal (note du 17 octobre 2021)…

 

 

1er décembre

 

Discussion hier au sujet de la nouvelle année. Il est question de deux jours ininterrompus, « départ » chez Léo en fin daprès-midi et « arrivée » à la maison dans la nuit du 1er janvier ; une sorte de « porte ouverte », en somme...

 

 

3 décembre

 

Marian a de nouveau pleuré. Antek me disait auparavant qu’il n’allait pas très bien, pensait à la mort, venait de prendre conscience de notre condition de mortel et plus précisément de celle de son entourage, ses parents, sa sœur... « Et encore un artiste », lui ai-je dit…

Nouvelle année : Doriane m’a dit que c’était décidé, que le premier jour se ferait chez Léo, qu’elle et lui s’occuperaient de la nourriture et que les invités auraient la charge de la boisson. Je lui ai dit que nous ferions de même de notre côté. J’en ai parlé à Éléonore, elle n’est pas d’accord : « deux endroits différents, c’est deux fêtes différentes, pas la même fête ». Je lui ai rétorqué que l’on pouvait très bien considérer qu’il s’agissait de la même qui se déroulerait dans deux endroits différents. Status quo. Je vais en parler à Léo...

 

 

6 décembre

 

Thierry m’a parlé de son nouveau tour de chant. À suivre pour les répétitions...

 

 

8 décembre

 

Je suis passé chez Valérie pour sa photo. C’est sa mère qui m’a ouvert : « Valérie n’est pas là. Elle est partie faire des courses. » Bien. Merci. Au revoir... (Son gilet était mal boutonné : par l’entrebâillement, j’ai aperçu le bas d’un soutien-gorge et un peu de sa peau. Quelques instants plus tard, elle y a posé la main. Je ne saurais dire si c’est suite à mon regard ou non...)

 

 

10 décembre

 

Il y avait un message de Valérie sur le répondeur, elle s’excusait...

 

13 décembre

 

Je suis passé chez Léo pour mettre au point la fête du Nouvel An. Nous avons trouvé une idée qui serait le lien entre les deux endroits : la Renaissance du Lys, c’est-à-dire un bassin des vœux installé également ici, à la maison, et, pour immortaliser l’événement et qu’il y ait recoupement avec la présentation de l’album, je prendrais une photo Polaroïd* de chaque personne devant le bassin ; pour résumer : une double carte de vœux. Mais est-ce bien clair ? J’en ai parlé à Éléonore qui m’a regardé d’un drôle d’air. Elle n’est pas du tout convaincue que ça soit une bonne idée. « Où est le lien ? » me dit-elle. Du coup, je ne sais plus, et cherche dans une autre direction. Quoi qu’il en soit, il y aurait plus d’une centaine de personnes à inviter. Il va falloir réduire, se fixer un noyau commun, puis concevoir deux invitations...

 

 

* en définitive, j’ai utilisé le même instamatic (note du 22 octobre 2021)

 

 

15 décembre

 

Je suis passé chez Léo pour que nous confrontions notre liste d’invités respective. Dans la foulée, je l’ai pris en photo pour l’album (enfin). Je suis ensuite allé chez Jeanne (j’ai pris deux photos d’elle), puis chez Marc. Je suis tombé en pleine répétition de leur « tour Piaf »* : Marc, Christelle, Cyril, Thierry et un nouveau venu, accordéoniste, un drôle de type, petit, maigre, dégarni, un pantalon de jogging dégueulasse – mais des doigts étonnamment fins qui tiraient de beaux sons de son instrument**. En observatrice, il y avait la photographe des Belles endormies (Charline ; je ne sais dire si elle est jolie ou non, mais, de toute évidence, elle est du goût de Thierry). Ça a été un peu houleux et, comme à l’accoutumée, bien arrosé. Après le repas, nous avons chanté. J’ai pris Marc, Christelle et Cyril en photo. J’étais particulièrement en forme, ça a été une excellente soirée... (Je leur ai demandé si ça leur dirait de se produire le 31 chez nous, en matinée, puisque Thierry et Marc seraient pris en soirée. Ils sont partants...)

 

* inauguré chez les parents de Thierry (note du 19 octobre 2021)

** finalement, il ne fera pas partie de la formation (note du 22 octobre 2021)

 

 

16 décembre

 

Cours à Marian ; il ne fait que progresser (mais s’obstine à refuser la lecture)...

 

 

19 décembre

 

Je suis passé chez Valérie pour la photo. Malheureusement, son ami était là, je me suis senti obligé de le prendre aussi…

 

 

20 décembre

 

Nous sommes allés chez Léo pour la mise au point définitive de la fête de fin d’année : « le Lys en Renaissance » pour le 30, « la Renaissance au Lys » pour le 31 ; un bassin des vœux chez lui et ici, le premier pour les vœux de fin d’année, le second pour la nouvelle année. Restait le problème de mon intervention. La logique voudrait que cela tourne autour de l’album donc, d’une certaine manière, de la photo ; l’album sera présenté le 31 (je ne sais encore de quelle manière) ; pour ce qui est du 30, nous avons pensé qu’il pourrait être intéressant et amusant que je constitue une sorte d’annexe à l’album proprement dit, c’est-à-dire un second album qui serait celui de la fin d’année et constitué de tous les invités de la fête qu’ils soient ou non de mon propre album ; je serais le reporter-témoin photographique de l’événement (à défaut d’en être le rapporteur littéraire), le chroniqueur, le journaliste... L’idée n’est pas mauvaise (quoique pas entièrement satisfaisante, à dire vrai)…

 

 

25 décembre

 

Il est prévu que nous allions passer trois jours en Angleterre, de lundi à mercredi. Jeudi, c’est la fête chez Léo. Je n’ai pas achevé l’album et n’ai toujours aucune idée pour sa présentation le 31. Quand vais-je le faire ? Je suis pris entre l’envie de partir et celle de rester ; en outre, je dois voir Thierry pour la répétition du Fauré et du Wolf que nous avons décidé d’interpréter dans l’après-midi du 31. Comment vais-je faire tout cela dans la seule journée du 30 ?

 

 

29 décembre

 

Nous avons répété le Wolf et le Fauré. Comme à l’accoutumée, je vais et viens entre la quasi-perfection et la médiocrité (mon éternel problème de blocage qui peut intervenir à n’importe quel moment). Hier après-midi, j’ai testé le piano de Léo puisqu’il y a de fortes chances que c’est chez lui que nous nous produirons. De la même manière, quatre, cinq fois sans erreur et puis, tout à coup, le trou, la catastrophe. Ce sera un coup de poker et je crains le pire. (Mais je pense que ça serait beaucoup plus adapté vendredi après-midi que jeudi soir : on ne peut demander l’attention d’une soixantaine de personnes en pleine effervescence...)

Léo a commandé un cochon de lait, Doriane va s’occuper des salades composées, Anouchka va faire des beignets. Pour ici, Éléonore compte faire un English breakfast le midi, puis thé l’après-midi (au son du « tour Piaf ») et buffet froid le soir. Je suis vraiment curieux de voir le nombre de personnes : 1) qui passeront la nuit ; 2) qui seront présentes aux deux endroits ; 3) qui seront présentes l’après-midi...

Au soir, Thierry m’a appelé : rien n’est encore sûr pour le tour Piaf, Cyril ne sait toujours pas s’il pourra se libérer (Éléonore compte tant dessus). Que faire s’il n’a pas lieu ?

Thierry et moi n’avons rien décidé pour notre prestation. Nous nous fierons aux circonstances, au « feeling », en quelque sorte...

 

 

31 décembre

 

Je mettais la dernière main à l’album lorsque Léo m’a appelé pour réclamer d’urgence des assiettes et des verres je suis arrivé avec une demi-heure de retard chez Thierry. Chez Léo, nous avons découvert, éberlués, un cochon de lait de trente kilos installé dans le jardin, gueule béante qui nous faisait face et d’où sortait la broche du barbecue spécial que Léo avait fabriqué quelques heures auparavant (il n’avait trouvé aucun appareil de cette taille en location, « alors, j’en ai fait un ! »). Nous avons déposé les cartons ; à l’étage Doriane, Fanny et Mia s’activaient ; nous avons aidé à la vaisselle des verres jusqu’à l’heure dite où nous avons regagné le rez-de-chaussée. J’ai occupé ma place au clavier, Thierry s’est installé sur un tabouret à côté de moi. Nous nous étions demandé comment interpréter deux pièces au cours d’une soirée. « Eh bien, on les joue à chaque fois que quelqu’un arrive. » « Bonne idée. » Nous avions un trac fou... À Antek, nous avons servi Fauré, puis Wolf à Gélase et Anémone, puis Fauré de nouveau aux suivants, et Wolf, et ainsi de suite (je n’ai pas failli une seule fois). Une heure plus tard, il nous a semblé que la plaisanterie avait assez duré et nous sommes allés prendre notre premier verre. Nous y sommes retournés une demi-heure plus tard, mais sans grande conviction (et personne n’écoutait), et je ne me suis plus consacré qu’à mon reportage… Pour accompagner le cochon, il y avait des pommes de terre à la crème confectionnées par Fanny et de la salade frisée ; puis fromage ; les beignets d’Anouchka étaient extraordinaires, je n’en avais jamais mangé de meilleurs, j’en ai avalé sept… Nous étions à peine trente-cinq, c’est-à-dire la moitié du nombre prévu – mais c’était très bien ainsi. C’est lorsqu’Anémone et Thierry s’en sont allés, vers trois heures du matin, que je me suis aperçu que nous n’étions plus qu’une dizaine : la fête touchait à sa fin, personne ne passerait la nuit. Je suis parti en compagnie de Mia et de Gélase que j’ai déposés. J’ai laissé un mot à Éléonore avant d’aller me coucher : « Don’t forget to wake me up. I have to pick up Thierry at twelve. » À midi, je me garais au bout de sa rue. J’ai bu un verre d’eau avec Gélase, tandis que Thierry prenait sa douche : il venait de se lever, n’était pas prêt : c’était la première fois que Thierry n’était pas prêt. Nous avons chargé une partie du matériel de musique et sommes partis pour Lille ; Gélase à l’arrière prenait des photos de tout ce qui ne bougeait pas. Christelle venait de se lever ; nous avons pris un café en attendant Marc qui est revenu avec un khebab et des frites. « Mais il y a le petit déjeuner à la maison », ai-je dit. Il a souri, a quand même avalé son khebab frites. Nous avons chargé le reste du matériel, pris la direction de Tourcoing pour y prendre Cyril à la sortie de son travail ; j’avais hâte de découvrir le nombre de personnes présentes au rendez-vous du « petit déjeuner anglais ». Autour de la table du séjour, il y avait Serguei et Clio, Lizzie et Thècle, puis un couple ami de Thierry, puis Mia accompagnée d’un inconnu. Éléonore s’activait dans la cuisine : saucisses, bacon, œufs, toasts, confitures, thé, café ; et buck’s fizz, champagne au jus d’orange, pour faire glisser. Gélase, Thierry et Cyril se sont installés, puis Christelle et Marc sont arrivés ; une demi-heure plus tard, ils se préparaient autour du piano. Durant un moment, j’avais craint qu’il n’y ait qu’un auditoire réduit, mais Antek, Doriane, Marian et Zoé sont arrivés, puis Léo, puis Horace et Fanny. Les livrets des paroles ont été distribués et le tour de chant a pu commencer. Nous étions une quinzaine, ça a duré une heure trente avec un entracte ; entretemps, il y a eu d’autres arrivées : Samy, Guillemette, Mylène, son compagnon, leur fils. C’est durant l’entracte que je me suis aperçu de l’absence de Jacques. Le récital a été parfait, les applaudissements nourris, tout le monde était enchanté. Marc, Christelle et Cyril ont promis de revenir au soir… Durant la soirée, l’album était simplement posé sur une table, chacun pouvait le consulter à sa guise. Quelques photos étaient disséminées sur les étagères de la bibliothèque d’Éléonore…

 

 

suite

retour