Se forcer à tenir le journal. Se dire : il faudrait que je monte ouvrir mon cahier et y rapporter les derniers faits ; en même temps se rendre compte que l’on n’en a pas envie, pas vraiment envie, et se dire aussi qu’il est dommage d’arrêter, mais pourquoi arrêter ? un arrêt de quelques jours peut-il signifier un arrêt complet, peut-il être l’indice d’un arrêt, d’une envie d’arrêter ? et se dire encore : est-il bien nécessaire de poursuivre ce journal qui, d’une certaine manière, a vu son terme le 24 décembre de l’année dernière, et ne se justifiait que par l’existence de V., et cette existence en allée, le journal perdrait tout son sens ; en même temps passer en revue les derniers faits et commencer déjà à les rédiger mentalement, à les mettre en ordre, à les comparer, les soupeser, à remonter trois semaines en arrière, jusqu’au 24 décembre où il y a eu cet arrêt brutal, et à partir de là revenir jour par jour jusqu’à aujourd’hui en essayant de se rappeler ce qui a marqué chacun de ces jours, surtout ne rien oublier ; et, au bout du compte, tout en remuant tout cela, monter quand même, monter avec l’envie diffuse de tout abandonner, avec dans la tête, outre ses pensées contradictoires, une foule de notes, de lignes et de formes qui cherchent à s’agencer, à se construire autour d’une seule idée : le Projet, et pour l’accompagner, indissociablement liée, l’énigmatique et de plus en plus présente Valérie…