Je viens de monter, regarde autour de moi, mon bureau en cours d’achèvement, les cartons, une dizaine qui jonchent le sol, je grimace en pliant et dépliant les doigts – les auriculaires tout à coup douloureux, rouges et gonflés (ça doit bien se soigner tout de même, pourquoi je n’appelle pas Humbert ?), je pense à demain que je devrais consacrer à la peinture et aux planches du placard, pense que je n’ai rien dit d’hier, pense au vent, à la pluie, à la tache qui s’agrandit au plafond de ma chambre, pense à cette maison, et, à l’instant, au long coup de fil d’Odin (un peu pénible et je me suis demandé s’il n’avait pas un peu bu), pense enfin à Ferrante. Énigme, qu’est-ce qui fait que je ne m’arrête pas, qu’est-ce qui me prend, qu’est-ce qui prend dans ces cas-là, prend et emporte alors qu’il n’y a rien, à proprement parler, qui puisse prendre et emporter (ça s’est tant et tant écrit) ; elle en est à son adolescence, a passé ses premières vacances seule sur une île (ou plus précisément est partie seule pour ces vacances), connaît sa première expérience sexuelle (plutôt sensuelle que sexuelle puisqu’il n’y a que le baiser et la caresse) avec un adulte qui veut la forcer, et je me dis : « enfin, ça bouge, il se passe quelque chose, quelque chose s’amorce », mais c’est un leurre, cet événement est important, mais, à la réflexion, il n’est pas plus important qu’un autre – et ça s’est tant et tant vu et écrit –, que d’autres détails, descriptions, faits, gestes, événements de son enfance, adolescence, et ce n’est pas ce qui va me pousser à continuer, c’est autre chose, mais quoi ? (Mystère, énigme de l’écriture ?...)