Et comme un fait exprès, les choses changent, se précisent, prennent enfin une dimension :

 

p. 59 :

« Je veux de toi le plaisir innommable que tu m'offres, en le nommant. »

Et plus loin :

« Pouvais-je à l'avance douter que l'idée de Dieu était fade comparée à celle de perdition. »

(À noter : l'invitation Styko trouvée dans ce volume et qui me sert de marque-pages...)

 

p. 80 :

« Si nous avions traduit ce tremblement de notre démence dans la misère d'un accouplement, nos yeux auraient cessé leur jeu cruel ; j'aurais cessé de voir ma mère délirant de me regarder ; ma mère aurait cessé de me voir délirer de la regarder. Pour les lentilles d'un possible gourmand, nous aurions perdu la pureté de notre impossible. »

Histoire de l'œil est le premier ; Ma mère le dernier. Le second est comme l'autre versant du premier, l'autre face du miroir.

Tout est caché, occulté, à peine suggéré, « retenu » au profit d'une sorte de raffinement (de la parole, de la pensée, de l'attitude). La rétention au nom d'un raffinement intellectuel contre le débordement total hors du regard cérébral... (Ça ne veut pas dire grand-chose…) Ce qu'il y a d'extraordinaire et de stupéfiant dans Histoire de l'œil, c'est que c'est brut, concis, immédiat, cru, sans ambages (?) ; ce qu'il a de gênant dans Ma mère, c'est que c'est explicatif, bavard, démonstratif, analytique (et presque psychanalytique)...

 

14 novembre 2000