« L’artiste rend le quotidien exotique, restitue
aux objets leur altérité (usure de l’habitude) et la rend perceptible ; le
voyageur désireux de connaître rend l’exotisme quotidien, se laisse ravir et se
matérialise ailleurs. On commence à habiter une ville étrangère lorsqu’on
déplace en elle ses capacités à s’ennuyer, c’est-à-dire lorsqu’on a modelé le
lieu en soi et surtout soi en le lieu, à la première cristallisation des
habitudes : ce parcours effectué plus de trois fois, ce café-ci, ce numéro de
bus, ce marché-là… On colonise le lieu par la répétition ou mieux encore on se
laisse coloniser. »