SEL II
intégral
J’ai abandonné ce délicieux spectacle pour aller m’installer à mon bureau d’où j’ai tiré quelques images dont j’ai voulu me rassasier. Mais le cœur n’y était pas. J’avais encore en tête ce terrible visage qui, alors que je sortais du module lunaire, me disait : « Il est temps, c’est le moment. Suis-moi que je te donne ton poison. » J’avais frémi et il avait ajouté : « Ne t’en fais pas, il est instantané, tu ne t’apercevras de rien. » Le plus terrible était qu’il s’agissait d’Innocent revêtu d’une sorte de combinaison argentée qui lui donnait l’apparence d’un ver d’Afrique. J’ai rangé mes images, suis retourné à la chambre où Naomi dormait toujours avec sur le visage une expression d’enfant. Je l’ai regardée, ai ressenti un tressaillement au fond de mon ventre qui, de la même façon, s’est vite dissipé au retour du visage d’Innocent dans mes pensées. C’est à ce moment-là que le réveil a sonné. C’était l’heure pour Naomi de se lever et de retourner chez elle. J’ai libéré son petit derrière, puis ses oreilles et tandis que la sonnerie retentissait pour la deuxième fois, je suis allé au cabinet de toilette nettoyer son Babelou. Il était tout crotté, c’était assez répugnant. Lorsque je suis revenu dans la chambre, elle s’étirait. « C’est le moment, il est temps que tu partes. » « Mon Babelou !» s’est-elle écrié. Je le lui ai tendu, elle l’a posé sur le petit guéridon et avec un sourire de doux soulagement, elle s’est levée. « J’ai fait un drôle de rêve », m’a-t-elle dit, « j’ai rêvé que je l’avais perdu. » « Quoi ? » « Mon Babelou. » « Mais non, il est là. » « Oui, je sais. » Elle s’est approchée de moi, m’a enlacé. « Heureusement que tu es là ! » « Oui, mais dépêche-toi, Ophélie va se réveiller. » « Oui, oui ! » Avec sa vivacité habituelle, elle a enfilé sa culotte, son maillot, sa jupette et ses socquettes. « Moi aussi, j’ai fait un drôle de rêve, tu sais. » Elle a posé un rapide baiser sur ma joue et a filé en direction de l’escalier.