Guy à Francko
%réactions, elle devenait soudain responsable du sort du monde : « Cette fois, c’est du sérieux, il y a danger. Viens ! » Et elle me tire vers l’arrière-salle. Malaise, le sol se met à pencher dangereusement, devient une pente sur laquelle il n’est plus possible de tenir debout, soudain je comprends la raison de cette structure en forme d’œuf, ce qui était un sol il y a encore quelques minutes est devenu cloison puis plafond, et nous deux on est ballottés dans tous les sens. « Non, c’est trop tôt, je ne veux pas mourir maintenant, j’ai encore des choses à faire, trop de choses ! » Je m’éveillai en hurlant, trempé de sueur, avec Naomi près de moi qui dormait comme un loir et, repliée sur elle-même comme un fœtus, suçait son pouce. Il faisait encore nuit noire, j’ai allumé la lumière. Sur la table de nuit, Les histoires extraordinaires d’Edgar Poe, une bouteille de Bell à moitié vide, un verre, et dans la bouche cet arrière-goût un peu lourd et râpeux qui me reste quand je bois trop avant de m’endormir. La phrase qui m’avait fait sortir du rêve m’est revenue à l’esprit : « J’ai encore trop de choses à faire. » Oui, trop de choses, mais si je ne m’étais pas éveillé qu’est-ce que ça aurait changé ? Les mondes peuvent tourner sans moi, le mien disparaîtrait, et alors ? Je suis sûr que si je disparaissais, Naomi ne se rendrait compte de rien, elle s’éveillerait dans ses rêveries habituelles dans lesquelles j’ai si peu de place, et ce ne serait qu’au moment de me demander de l’argent qu’elle remarquerait mon absence. Je me suis tourné vers elle, j’ai écarté le drap et j’ai vu qu’elle avait encore dans son petit derrière le godemiché qu’elle avait voulu que je lui introduise pendant que je m’occupais de son sexe gourmand. Naomi craint les fuites nocturnes, c’est pourquoi elle suce son pouce, utilise des boules Quies, et ne s’endort qu’avec un objet dans le derrière, quand la main qu’elle ne suce pas loge au bas de son ventre pour en protéger l’entrée. Je l’ai recouverte avec le drap et me suis levé. %J’ai abandonné ce délicieux spectacle pour aller m’installer à mon bureau d’où j’ai tiré quelques images dont j’ai voulu me rassasier. Mais le cœur n’y était pas. J’avais encore en tête ce terrible visage qui, alors que je sortais du module lunaire, me disait : « Il est temps, c’est le moment. Suis-moi que je te donne ton poison. » J’avais frémi et il avait ajouté : « Ne t’en fais pas, il est instantané, tu ne t’apercevras de rien. » Le plus terrible était qu’il s’agissait d’Innocent revêtu d’une sorte de combinaison argentée qui lui donnait l’apparence d’un ver d’Afrique. J’ai rangé mes images, suis retourné à la chambre où Naomi dormait toujours avec sur le visage une expression d’enfant. Je l’ai regardée, ai ressenti un tressaillement au fond de mon ventre qui, de la même façon, s’est vite dissipé au retour du visage d’Innocent dans mes pensées. C’est à ce moment-là que le réveil a sonné. C’était l’heure pour Naomi de se lever et de retourner chez elle. J’ai libéré son petit derrière, puis ses oreilles et tandis que la sonnerie retentissait pour la deuxième fois, je suis allé au cabinet de toilette nettoyer son Babelou. Il était tout crotté, c’était assez répugnant. Lorsque je suis revenu dans la chambre, elle s’étirait. « C’est le moment, il est temps que tu partes. » « Mon Babelou ! » s’est-elle écrié. Je le lui ai tendu, elle l’a posé sur le petit guéridon et avec un sourire de doux soulagement, elle s’est levée. « J’ai fait un drôle de rêve », m’a-t-elle dit, « j’ai rêvé que je l’avais perdu. » « Quoi ? » « Mon Babelou. » « Mais non, il est là. » « Oui, je sais. » Elle s’est approchée de moi, m’a enlacé. « Heureusement que tu es là ! » « Oui, mais dépêche-toi, Ophélie va se réveiller. » « Oui, oui ! » Avec sa vivacité habituelle, elle a enfilé sa culotte, son maillot, sa jupette et ses socquettes. « Moi aussi, j’ai fait un drôle de rêve, tu sais. » Elle a posé un rapide baiser sur ma joue et a filé en direction de l’escalier. ;