Francko à Jacques
%de ce paysage que jusqu’à présent seuls des cartoonistes et un reporter puceau accompagné de son chien avaient arpenté. « Et Lang, qu’est-ce que vous en faîtes ? » Je me suis retourné : devant moi, se tenait Pfall dans l’appareil qui l’avait rendu célèbre… « Lang ? Vous voulez dire Tchang, car à puceau, puceau et demi ! Pardonnez-moi mais si je ne fais erreur vous êtes Monsieur Hans Pfaall, n’est-ce pas ? Vous allez rire, j’ai eu l’occasion de lire un compte rendu de vos aventures il y a peu, des plus plaisant autant que fantaisiste, il se terminait par le sous-entendu que vous êtes un escroc, que vous n’êtes jamais venu jusqu’ici, n’avez jamais quitté Rotterdam, sauf peut-être pour une expédition outremer de laquelle on vous avait vu revenir de l’argent plein les poches, déjà prêt à le dépenser en beuveries d’ivrogne dans quelques bars mal famés des faubourgs, j’ai beaucoup ri, qu’en dites-vous ? » « Hé bien je vous dirais tout le bien que je pense des bars des faubourgs de Rotterdam, et aussi de Bruges et d’Amsterdam, et le peu de bien que je pense de ceux qui me jalousent. Quoi qu’il en soit, je sais leur rendre leur jalousie – je les emmerde, « bren sur eux » à l’occasion en les survolant de mon fier mongol – et si vous voulez bien m’accompagner j’aurais plaisir à vous proposer de les emmerder à l’occasion, avant de vous faire partager ma légendaire ivrognerie. Cela me fait penser qu’il est déjà l’heure de l‘appértif et que je ne vous encore rien offert à boire. Je vous emmène, et permettez-moi de vous régaler. Mais empruntons le passage soulunain, vous n’avez pas votre parastein et nous sommes en pleine saison des pluies. Je serais désolé qu’un malheureux météorite fût responsable d’un accroc à votre spencer. » Pfaal se dirigea vers l’entrée aménagée d’une petite grotte dont le couloir s’illumina automatiquement à son passage. Au fond, un puits circulaire était recouvert d’une sorte de nacelle métallique peinte en jaune vif, surmontée d’un cigare vertical, vibrant sous la pression. Il fit coulisser le portillon, le fit glisser en sens inverse à la suite des passagers et, % levant le bras, il déverrouilla la valve du cigare et le véhicule se mit à descendre jusqu’à une étroite galerie éclairée environ tous les dix mètres de lustres XIXe de l’école Murano. Montrant l’exemple, Pfaal enfourcha la première des mondbrettes rangées sur le côté, et en avant la troupe ! l’équipée s’ébranla gaiement. « L’arrêt Mer d’Ecosse est à deux kilomètres, nous y trouverons les meilleurs whiskies que j’aie pu emmener jusqu’ici. Le L&J-Bar est mon établissement pilote, pourrais-je dire. j’ai déjà convaincu deux fillettes à m’accompagner ici pour s’en occuper. Lulu est irlandaise et elle a embarqué avec elle sa petite amie Jeanne. Pour vous dire que c’est chasse gardée ! » Une fois arrivés, un panier semblable au premier ramena tout le monde en surface , au bord d’un petit patio couvert d’un large filet bien tendu et qui se prolongeait jusqu’à recouvrir intégralement le toit de l’établissement. Sur le côté droit, un ravin presque insondable recueillait, grâce au balayage automatique du filet, les cailloux qui venaient là terminer leur errance galactique, On s’installa au bar. « Hello, mes belles ! lança Pfaal joyeusement. Un flacon de Bell pour la route, on the rock’s. » Puis, se retournant : « Et ensuite, nous y allons ! L’appareil qui m’a rendu célèbre nous emmènera en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. » Si l’on voulait en croire l’inscription sur son cache-cœur, c’est Lulu qui vint servir en fredonnant sur l’air qu’émettait le piano mécanique. À sa suite arriva une fille menue aux yeux rieurs qui salua l’assemblée d’une révérence. « Voulez-vous absolument que nous emmenions votre amie ? » « Oh ! laissons-la voulez-vous, elle ne supporterait pas les vapeurs des bars et pour voyager elle préfère les trains. Par ailleurs il faut s’en méfier, elle a la bouche gourmande. » « Alors embarquons ! Mais dites-moi, comment puis-je vous nommer ? » « François Rabbeau si cela vous convient. » L’appareil de Pfaall, couvert de journaux crasseux, fonctionnait admirablement et d’une façon on ne peut plus simple que je ne saurais expliquer. Il n’avait cessé de l’améliorer. Je quittai la lune en sachant que je pourrais y revenir avec mon nouvel hôte, ;