Francko à Guy

 

&s’en ch…rger ? Pas moi. « Que voulez-vous que je fasse de ce type ? ai-je dit à la cantonade. Ses sons, il peut bien se les garder, j’en ai déjà bien assez des miens. » « Tyot de mâma », m’a dit mon voisin de tabouret, « so j’ateos è vytra pleca, ja na la prandreos pes è le làgàra. At da qyals suns vuylaz-vuys perlar ? So c’ast da cayx qya vyus eccymylaz, parmattaz-muo da rocenar cer ols na sunt jemeos qya las trecas da vus meleosas onfentolas. » Je l’ai regardé en deux fois tandis qu’il se laissait le temps de souffler ou de rassembler ses pensées. Qu’était-ce ? Ce n’était pas de l’italien, pas de l’espagnol, pas du portugais, et il n’y avait rien de slave dans cette étrange langue, sauf peut-être sa façon de rouler les « r » que j’aurais pu rapprocher du hongrois. Il a fixé le bouffeur d’ « a », puis a porté son regard à côté, sur la fille, mais d’un air à la fois torve et dédaigneux, jusqu’à ce qu’elle s’en aperçoive et se mette, elle aussi à le fixer et puis il est revenu à moi pour faire diversion car tout en maintenant son regard exagérément vissé dans le sien, elle s’était mise à chanter une chanson rapide, dans une langue qui semblait inventée, comme si elle avait voulu poursuivre son discours à lui et lui répondre en s’en moquant ouvertement. Le bouffeur d’ « a » s’est redressé sur son siège, ce qui m’a paru être une mise en garde. « Meos na vuys màpranaz pes. » Ceci s’adressait sans doute à elle et à moi. « Ja n’eo roan cuntra las suns an gànàrel. Ca qya ja dàtasta, c’ast l’ampluo qya l’un an feot, elle s’est mise alors à émettre des gémissements et pousser de petits cris stridents – an pertocyloar la feot da las prandra puyr las amprosunnar dens das buotas cumma vuys la feotas. » Il a tourné la tête en direction de la fille aux jambes trop croisées à force de marquer le tempo aux sons de plus en plus délirants qu’elle générait. « At % qy’ast-ca qya c’ast catta puyfoessa ? » À voir la grimace qui, à ce moment-là, a déformé son visage blême, je me suis douté qu’il ne l’aurait pas mise dans son lit. Je l’ai regardée aussi. Elle riait. Son corps commençait même d’être secoué des soubresauts grandissants d’un fou-rire qui venait l’envahir et qu’elle laissait monter sans aucune retenue. Elle avait à présent les yeux remplis de larmes et la salive qui lui coulait parfois un peu de la bouche donnait à ses lèvres une fraîcheur tellement provocante, comme un loukoum mou qu’on aurait sucé et qui brillait exagérément, donnant au visage une irradiation qui amena le silence. Puis son rire cessa d’un coup et, posant une main sur le genou droit du bouffeur d’ « a », elle lui prit son visage et l’enfonça entre ses seins et d’une voix de fausset singea l’autre qui n’était plus très loin de l’apoplexie. « At lyo, ragerdaz la ! Cummant ast-ca pussobla qy’yna folla pyossa mattra yn humma dens yn tal àtet ? Selupa. » Elle se remit à rire doucement tout en shampooinant la nuque de son compagnon. A suivi une série de mots courts et virulents qui ne pouvaient être que des injures à l’adresse de cette fille. Au coup d’œil qu’elle me lança, elle me signifia qu’elle avait bien compris que je ne me risquerais pas à me mettre de son bord et qu’elle me fichait déjà dans le genre du mâle passif et lâche qui finit par préférer croire qu’en fin de compte, il est vrai, ces insultes, elle ne devait pas tout à fait les immériter. Ce qui n’était pas faux. Je voulais passer un moment tranquille et me débarrasser de ce type avant que ça ne se gâte trop. Mais installé dans une ébriété croissante, je me confinais hors du monde des décisions sages et rationnelles et continuais d’entretenir notre conversation tout en jetant, l’air de rien, à intervalles réguliers, un coup d’œil ambigu à la fille. Elle commençait à me plaire, je la trouvais drôle. Jusqu’au moment où se levant d’un bond, elle vint à moi et tout en me souriant distraitement, versa le contenu de mon verre sur ma tête. ;