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2003

 

*

 

 

 

8 janvier

 

Cette fois-ci, ça a été un cours de guitare, qui plus est électrique. J’ai descendu l’ampli du premier, il a apporté la caisse qui effectivement contient bien une Fender, un modèle qui avait appartenu à Rupert. C’est un beau modèle et, ma foi, de bonne tenue. Je lui ai appris à l’accorder, lui ai donné quelques conseils d’accords sous l’œil intéressé d’Antek qui ne cessait de lui répéter : « mets moins de basses, mets moins de basses »…

 

 

20 janvier

 

Je suis tombé sur le tableau des Annuités*, l’ai consulté. J’en suis au mois d’août qui correspondrait à Vrac**. Tiens… (Et Clara ? et quel sera le prochain livret ? et le Journal Musical ? Le Livre ? Lucca ? Venise ?...)

 

* série qui devait comporter douze numéros, un par mois ; c’est resté inachevé

** un ancien texte qui, comme son titre l’indique en partie, était un recueil de jets divers et sans lien  (notes du 26 octobre 2021)

 

 

31 janvier

 

Près d’une heure trente de cours, la guitare de nouveau, accords, Beatles. Il désire apprendre Girl. De ce fait, au cours de guitare pratique et de théorie musicale s’ajoute un cours d’anglais (le porte-monnaie de Doriane va en prendre un coup)...

 

 

13 février

 

Les idées de livrets se bousculent : Le Livre, un Vrac qui contiendrait diverses choses : Vrac (l’original), des extraits de Mail*, des fragments de mon journal d’adolescent, puis Le Vin, La Cure, Clara, et, j’y pensais dans l’après-midi, Fabien qu’il faudrait relire… Introduire des esquisses, des choses inachevées. Et il y a le Journal musical et le CD. Et Lucca/Praha et Venezia

 

* ? (interrogation du 26 octobre 2021)

 

8 mars

 

Elle est grande, jolie ; a le regard vif et éclairé*. Nous nous sommes installés à la table du séjour ; elle y a posé son matériel, un enregistreur numérique et deux micros miniatures ; le tout tenait dans la main. Ça m’a intrigué, je lui ai demandé des renseignements : une heure et demie d’autonomie, une qualité qu’elle dit excellente, un prix modique. J’ai songé à mes Revox intransportables, au Nagra au prix prohibitif. Elle a installé les micros, a fait quelques essais. Je lui ai avoué que je n’avais pas grand-chose à dire au sujet de la voix en général. « Ça ne fait rien, nous verrons bien, le principal est la rencontre. Nous verrons ce qu’il en ressortira. » Elle a enclenché. Nous avons parlé des éditions, de l’écriture, puis de musique, et de voix. Elle avait avec elle un exemplaire d’un livret qu’elle a placé devant elle. Elle m’a posé quelques questions qui m’ont décontenancé, m’ont mis face à ce constat qu’effectivement je n’avais rien à dire sur la voix. « C’est du domaine de l’informulable, de l’insaisissable », ai-je dit. La conversation s’est faite à bâtons rompus. À un moment donné, elle m’a demandé de lire un passage qu’elle avait choisi dans l’exemplaire ; j’y ai vu comme un salut, j’aime lire à voix haute,  mais je m’en suis mal sorti. Au bout d’une demi-heure, elle a arrêté l’enregistrement. Je me suis préparé une cigarette, elle m’a demandé la permission de m’emprunter mon tabac. Nous avons continué à bavarder tout en fumant. Elle est enseignante d’anglais ; outre cette émission, elle prépare des projets radiophoniques qu’elle soumet à France Culture. « Je suis désolé. Je n’ai rien à dire. Je ne suis pas quelqu’un de spontané, j’ai besoin de temps, de réfléchir aux choses. » « Ça ne fait rien. Mais on peut se revoir, si vous voulez. » Je lui ai proposé, puisque nous en parlions, une copie des extraits du Journal musical. Elle enseigne à Roubaix. « Je passerai la prendre, si vous voulez. » « D’accord. » « Votre écriture a-t-elle changé au fil du temps ? » « Oui, dans le sens de l’épuration, de l’économie, principalement à cause du journal qui impose, malgré soi et malgré tout, le raccourci, la réduction. » J’ai ajouté que ce n’était pas véritablement de l’écriture, lui ai dit que je « regrettais » un peu la période de la fiction qui, elle, était de l’écriture. « Pourquoi ? » « Parce qu’on s’y attarde. » Je m’aperçois, alors que j’écris, à quel point c’est juste ; j’écris, je rapporte, dans le brouillard, sans me donner le temps de réfléchir ; je rapporte parce qu’il faut rapporter ; j’aligne des mots, c’est tout…

 

* Hélène. Elle avait une émission à Radio-Campus et mavait contacté pour une série quelle consacrait à la voix (note du 26 octobre 2021)

 

 

12 mars

 

Marian sort sa guitare, gratouille sans m’écouter. Je n’insiste pas plus que ça, perdu que je suis entre le piano et la guitare ; je ne sais que lui dire, comment poursuivre le cours qui, de toute évidence, bat de l’aile. Il veut faire du piano rock, ou blues, « pour changer ». Je n’ai rien de tout cela dans mes valises et, dans l’attente, lui colle un nouveau Bach…

Je me suis enfin attaqué au contenu du CD. Je me suis décidé pour une liste alphabétique des extraits du Journal Musical. Le temps sera limité à cinquante-deux minutes. Reste à tout mettre bout à bout, à écouter, à faire le tri. Gros travail en perspective…

 

 

19 mars

 

J’ai de nouveau écouté le bout à bout alpha des pièces du Journal Musical en tâchant d’en faire un montage mentalement. J’ai opté pour la solution suivante : conserver l’ordre alpha en me concentrant sur un enchaînement cohérent et donc sauter systématiquement toutes celles qui ne conviennent pas ; je les conserverais dans leur ordre, elles constitueraient un second CD, puis un troisième, etc., « alphabet » en vue de CD ultérieurs. Mais me fais-je bien comprendre ?*

 

* non (note du 25 octobre 2021)

 

22 mars

 

J’ai profité de cette après-midi offerte pour effectuer la liste alphabétique de toutes les pièces du Journal musical. Je pensais que ça allait m’aider à y voir plus clair. Il n’en est rien. C’est pire….

J’ai enfin achevé la transcription numérique de la partition du Veston*. Combien m’en reste-t-il encore si je compte les partitions pour Léo et celles du Journal musical ? Cent, deux cents ?…

 

* je pense qu’il y a une erreur : il n’y a pas eu de musique attachée à cette exposition de Léo ; je veux sans doute parler des pièces que j’avais écrites pour la présentation de son diplôme (note du 25 octobre 2021)

 

 

23 mars

 

J’ai poursuivi la transcription des partitions du Journal musical. Je n’ai toujours pas trouvé de solution satisfaisante pour l’ordre à adopter pour le (les) CD(s), d’autant qu’il reste encore une bonne vingtaine de pièces à faire interpréter et à enregistrer. En outre, le problème de l’enregistrement en numérique à l’aide du logiciel que m’a fourni Childéric n’est pas encore réglé. Thierry m’a conseillé de me rapprocher de Marc qui manie ça depuis des années…

 

 25 mars

 

Hélène devait passer prendre la cassette que je lui ai préparée. Auparavant, elle m’avait laissé un message pour me suggérer d’en profiter pour m’interviewer de nouveau. Je lui ai répondu que je n’étais pas très en forme. Du coup, elle n’est pas passée du tout…

 

 

27 mars

 

Midi. Je pense à un ordre logique à appliquer à la diffusion du Journal musical : celui de l’écoulement du temps horizontal, c’est-à-dire le mouvement horizontal qui se déplacerait « le long » d’un calendrier, c’est-à-dire la chronologie horizontale qui est celle, je viens de vérifier, qu’inconsciemment j’ai appliqué au calendrier Lanlys du site*. Reste un point : dois-je diriger, contrôler la qualité de l’ensemble ? Dois-je, malgré tout, faire un choix, et je pense notamment aux toutes premières pièces qui n’ont strictement aucun intérêt et que j’évacuerais bien ? À ce propos, et j’en parlais à Léo l’autre jour : dois-je tout faire entendre ? (Oui, dans la mesure où j’ai appliqué la règle de l’intégrale aux journals écrits ; le Journal musical devrait, en toute logique, suivre la même règle.) Pour être clair, au sujet de la chronologie horizontale (ou l’est-ce déjà ?), je pars du premier janvier pour passer au premier février etc. et une fois parvenu au premier décembre, je reviens au 2 janvier pour passer au 2 février etc. Deux points négatifs : il y aura une succession de pièces sur bande magnétique et des partitions, ce sera sans doute au détriment de la cohésion de l’ensemble, musicalement parlant ; deuxième point : toutes les partitions n’ont pas, à ce jour, été interprétées et enregistrées…

Je viens d’entamer la liste chronologique des pièces et je m’aperçois que je m’aide du calendrier de cette année. Il y aura des différences. Dois-je considérer le calendrier original, celui de 1993 (que du reste je ne possède plus) ou celui d’aujourd’hui, dix ans après, en jouant sur une confusion du temps et en rectifiant si nécessaire ? (Je constate, par exemple, que Peggy n’apparaît pas cette année – devrais-je faire l’impasse ? cette question se pose à l’instant où je m’aperçois que cette pièce, du début du mois de janvier, est mauvaise...)

 

* le journal du site ; sa règle est 11 pour le 1er janvier, 21 pour le 2 janvier, 12 le 1er février, 33 le 3 mars, ainsi de suite… Rétrospectivement, je ne vois pas trop quel est le lien (note du 25 octobre 2021)

 

 

30 mars

 

Une chose me trotte dans la tête depuis hier. Antek et moi avons eu une discussion à propos de Mulholland Drive de Lynch. Il m’a dit que Guenièvre savait tout à son sujet, qu’elle pouvait tout expliquer. Elle est venue hier, je lui en ai parlé. Elle m’a dit qu’elle avait le découpage et que tout y était. Pour résumer, le film est « plié » en deux et la boîte est la charnière (elle a ajouté que Lost Highway était construit selon l’anneau de Moebius). Un déclic s’est alors produit. Pliage en deux, je me suis demandé ce qu’un tel système pourrait donner à l’écrit, et en particulier appliqué au journal. De là, la recherche de construction /déconstruction que je pourrais appliquer au Journal musical (et au Journal amoureux, ça m’est venu à l’esprit par la suite). Quelles formes, quelles figures pourrais-je appliquer au journal ? J’ai pensé à la spirale, tout d’abord pour le Journal musical, ensuite pour Le Journal amoureux. J’ai rejeté le premier, car la chronologie horizontale est plus juste, plus logique ; pour le second, c’est beaucoup plus intéressant, et sans doute faisable : une spirale partirait du 1er janvier pour s’achever, je viens de vérifier, le 16 juin ; ou alors qui se déploierait dans l’autre sens, du centre vers la périphérie…

 

 

31 mars

 

Thierry m’a proposé de refaire mes pièces vocales avec Cyril et Denis. (Il boit toujours autant, c’en devient inquiétant. En tout cas, ça m’inquiète.)

Tester la spirale sur le Journal musical… Appliquée au Journal amoureux, le premier tour de la spirale s’achève sur ces mots : « te dire que je t’aime t’aime »… (Le correcteur refuse que l’on double « t’aime »… On ne peut pas aimer deux fois…)

(Quelle drôle de manière d’écrire : je vais de l’un à l’autre, espèce de jeu d’alternance, de va-et-vient qui me consterne un peu, et m’intrigue : d’un message d’Hélène – elle est souffrante, me dit qu’elle ne pourra venir aujourd’hui alors que le rendez-vous est pour la semaine prochaine – à Fabien, de Fabien à cette page du journal, pour de là aller à la « spirale V » tout en pensant au Livre de mars à achever et aux partitions des quatuors vocaux à transcrire. Ce n’est pas la première fois que je note cela. À quoi cette manière de « travailler » correspond-elle ?...)

 

 

14 mai

 

Doriane aimerait que Marian et Zoé fassent un petit récital de piano samedi*. J’en ai parlé à Marian, il n’est pas contre. Je lui ai suggéré le dernier prélude de Bach, la Marche turque (qu’il accomplit toujours avec un brio impressionnant) et la première partie de la Mazurka. Il m’a suggéré d’y ajouter la Première gnossienne, moi que nous réessayons En plus ; nous l’avons répété durant une heure… Durant les premières minutes, Antek est apparu, les mains pleines de plâtre. Marian jouait la Marche turque ; trop vite et il s’est trompé. « Tu te trompes », lui ai-je dit. « De toute façon, ça fait cinq ans qu’il se trompe » a fait Antek avant de disparaître. Quelques minutes ont passé, Marian continuait. Puis, tout à coup, il s’est immobilisé, a fixé le vide, s’est fermé. « Qu’est-ce qu’il y a, Marian ? » Mais je savais de quoi il s’agissait. « C’est à cause de ton père ? » « Non. » « Je t’ai dit quelque chose qui t’a blessé ? » « Non. » A suivi un long silence durant lequel il est resté prostré sur son siège. Je ne savais comment le rompre. Lui poser des questions n’aurait servi à rien, j’en avais déjà fait l’expérience avec lui, aussi bien qu’avec Luce et Julien. C’est alors que j’ai eu l’idée d’En plus. Ça l’a remis en route… C’est au retour de sa mère avec Zoé que Marian m’a avoué qu’il s’agissait bien de la réflexion de son père. Puis il leur a dit sur un ton grave et autoritaire : « Vous pouvez nous laisser toutes les deux ?... » L’ambiance « relâchée » qui caractérise chacune de nos rencontres, le thé, le passage des uns et des autres, Doriane et Antek qui s’installent pour me parler, doit le perturber beaucoup plus que je ne le pense. Je m’étonne que Doriane, en tant qu’enseignante, ne comprenne pas ça… (Marian ne serait donc qu’un petit singe à exhiber devant des invités ?)

La plupart du temps, cest lui qui m’ouvre la porte. Alors que nous nous faisions la bise, il a posé la main sur mon épaule. Il l’a de nouveau fait à mon départ. C’était la première fois. Cette marque d’affection m’a beaucoup touché…

 

* je ne sais plus pour quelle occasion (note du 26 octobre 2021)

 

 

20 mai

 

Marc est passé pour mon problème d’enregistrement avec Soundforge. Il l’a résolu au bout d’une demi-heure. Ça marche, je peux désormais convertir le Journal Musical (à quelle religion ? celle du numérique ?) –, mais aussi la totalité de mes compositions sur bandes. Ça m’a exalté. J’ai commencé dans la soirée. Mais, à la troisième pièce, il y a eu des sautes à l’enregistrement, ainsi qu’à la quatrième. Que se passe-t-il ? J’ai aussitôt écrit à Childéric…

 

 

21 mai

 

Le cours a été particulièrement dissipé, pratiquement inexistant (au fait, cela fait des mois que Doriane ne m’a pas remis de chèque, elle n’en parle même plus) : Antek, installé désormais en partie dans le séjour*, me parle, Doriane rentre, me parle, passages incessants, puis Zoé… Au bout d’un quart d’heure, Marian a disparu de la circulation, est monté avec sa sœur. À quoi sert donc que je vienne ? Le cours en soi cède de plus en plus la place à la visite de courtoisie. Je ne comprends pas Doriane et Antek, ne comprends pas leur comportement vis-à-vis de Marian en particulier. Et j’allais oublier : Antek avait acheté tout un lot de vêtements des « années soixante-dix », « fabuleux », et le premier quart d’heure s’est passé en essayages, Marian et Zoé à tour de rôle. Marian joue, je suis à côté de lui, Antek dit : « et essaye ça ! » « et ce blouson, magnifique ! Essaye, Marian ! » Que puis-je dire et faire ?…

 

* il n’avait plus d’atelier (note du 26 octobre 2021)

 

 

22 mai

 

J’arrive à la fin de la transcription des compositions du Diplôme. Childéric m’a envoyé quelques indications pour l’enregistrement numérique ; j’ai fait quelques essais, ça a l’air de marcher. Il me reste à déterminer la manière de présenter les pièces du Journal Musical. Ni chronologique, ni alphabétique. Comment alors ? Et que vais-je faire des « indésirables », des mauvaises pièces ? Et que faire des pièces non enregistrées ?

 

 

26 mai

 

Je n’ai toujours pas trouvé de solution pour le Journal Musical. J’ai pensé cette nuit à la figure de la croix qui traverserait cette période de temps, elle permettrait d’alterner pièces sur bandes et pièces interprétées. Mais il reste le problème des pièces non exécutées. Qu’en faire ? comment les considérer ? pourrais-je les utiliser en son numérique, synthétique ?...

 

 

27 mai

 

J’ai appliqué ma nouvelle méthode de parcours au Journal Musical qui a l’avantage d’alterner pièces sur bandes et pièces interprétées, en jouant en plus sur le croisement de l’horizontalité et de la verticalité : c’est la croix, justement : 1er janvier, 1er juillet, 2 février, 2 juin, 3 mars etc…*

 

* je ne comprends pas – ou plus (note du 25 octobre 2021)

 

 

28 mai

 

Marian a reçu le recueil des préludes de Chopin que je lui avais commandé aux États-Unis. Il est content. Nous avons aussitôt attaqué celui qui l’intéressait, le 28, qui figure dans le film de Levine, Le portrait de Dorian Gray. Antek était là, il m’a entraîné dans une discussion au sujet de la vanité, du nihilisme, de l’art dans les poches des nantis, de la musique starisé. Puis il est allé peindre dans le jardin. J’ai passé près de deux heures avec Marian. C’est un morceau assez coriace qui nécessite une technique qu’il n’a pas encore. Mais il ne semble pas découragé, au contraire… (Antek morigène Marian parce qu’il est censé rentrer de l’école à 18 h 00 et non à 18 h 05 ; le traite de « ringard »…)

 

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