Après l'Immoraliste de Gide, j'ai entamé La
Renarde de Mary Webb. J'en suis à la cinquantième page et je ne suis pas
sûr de pouvoir dire de quoi il retourne ; c’est à peine si je me
souviens du nom des personnages (sauf Hazel qui évoque en moi une vieille
chanson des Troggs, Hihi Hazel). Je pensais, en le tirant dans la
bibliothèque ce matin, que ce type de roman classique fin XIXe – qui à mon sens ne devait pas être très
différent de Sarn que j'ai lu il y a quelques mois avec un certain
plaisir (mais rien que du plaisir) – correspondait tout à fait à mon
état d'esprit, c’est-à-dire une sorte de langueur enveloppée de lassitude
et de fatigue auxquelles s'ajoute une dispersion de mon esprit vers divers
points allant de ce journal, dont je ne sais encore s'il ira très loin et que
je m'efforce de trouver utile, à Lyon (qui, elle, est effectivement loin, et ce
sans l'ombre d'un doute), en passant par l'éventail des multiples possibilités
qui me sont offertes pour mon existence à venir. Bref, une inattention
complète, un désintérêt confinant à l'aveuglement – quasi total vis-à-vis
de l'extérieur, qui ne pouvaient supporter qu'un récit propre et net, linéaire
et attendu (convenu ? entendu ?) ne demandant aucun effort particulier et dont
le seul intérêt ne devait être, au-delà du souci « historique »
littéraire – ces guillemets me sont inspirés par une récente
interview de Godard, j'y reviendrai certainement – que le plaisir de
la lecture à son premier degré :
3 janvier 1990 (dans une lettre
à Marcel)