Il était accompagné de sa sœur et de son beau-frère. La conversation est
rapidement devenue générale, ça a duré une bonne vingtaine de minutes sur le
trottoir. J’ai parlé avec la femme, lui ai dit que I was a writer, « Guy de Maupassant », a-t-elle dit en riant.
« Maybe in ten or twenty years
time », ai-je dit. Elle a voulu en savoir
davantage, dont mon nom lorsque je lui avais répondu que oui, j’avais été publié
– je ne le lui ai pas donné, lui ai dit que je n’étais pas connu du tout et tout
lui expliquer aurait été compliqué et sans doute inutile – et qu’aurait-elle
fait de mon nom si elle ne lit pas le français ?). Je n’avais pas eu envie de
dire que j’étais « retired » ou quoi que ce soit d’autre et c’est « writer » qui
m’est venu à l’esprit en premier. (L’ami d’Éléonore m’a dit qu’adolescent il
avait travaillé à Nice. « As a plongeur. » J’ai failli lui parler d’Orwell.)
Le troisième était fermé, un quatrième fermé aussi et je lui ai proposé que nous
retournions à celui de la dernière fois. Sur la route, nous sommes tombés sur
Meredith. Nous y sommes allés ensemble, c’était fermé, il était à peine 16 h 00
(elle me dira ensuite qu’elle ne comprend pas que les tea-shops puissent fermer
si tôt ; je m’étais fait la même réflexion). Meredith nous a laissés, nous
sommes allés dans un drôle d’endroit, bar restaurant, lounge (c’est du reste le
nom, il me semble, Lounge Bar), immense et assez accueillant (il y avait
beaucoup de toiles aux murs, dont une en face de moi, portrait d’un homme en
buste, qui m’a plu et que j’aurais aimé emporter). J’y ai avalé deux pieces of
cake avec mon café. L’après-midi touchait à sa fin lorsque nous sommes rentrés. J’ai oublié de
dire qu’avant le départ, Éléonore m’a demandé de lui donner une leçon de guitare
(la dernière date d’il y a vingt ans). J’étais dehors, lisais Theroux, il
avait commencé à pleuvoir. Je lui ai donné son cours à travers les gouttes –
elle avait refusé de rentrer –, c’est-à-dire trois accords qu’elle doit à
présent travailler… (Elle m’avait aussi demandé de les tracer sur une feuille ;
je me suis étonné qu’elle ne se serve pas du réseau... Bien sûr, elle n’y a pas
touché depuis.) J’ai l’impression que les palpitations reviennent. Serait-ce le
café ? (C’est Éléonore qui l’a suggéré ; c’est vrai qu’il était très fort – et
bon –, mais je ne pense pas que ça agisse si vite, et la veille je n’en avais
pas bu...)