Puis le dossier consacré au journal intime : parallèle B. Morisot et Sylvia Plath, l’une et l’autre ayant tenu, pour des raisons différentes, un journal ; le rapport que voit l’auteur entre le journal de Berthe et sa production artistique ne me semble pas très convaincant : elle aurait pu tout aussi bien ne pas le tenir, et ce journal pourrait tout aussi bien être une liste de commissions (aurait-elle dans ce cas peint des courgettes et des potirons ?) ; ça l’est beaucoup plus dans le cas de Sylvia Plath (dont je découvre ici l’existence) pour qui le journal est un lieu de combat et de vie ; et un lieu d’écriture : une États-unienne dans les années cinquante, mariée à un poète reconnu et talentueux (Ted Hughes ?) et souffrant de sa condition de femme reléguée à l’enfant et au tablier tout autant que de sa condition d’épouse, écrit et est confrontée tout à la fois à ses propres difficultés à écrire et au complexe d’infériorité que crée le rapport avec son mari lui-même écrivant (voir Eva Hesse, mais aussi tous les couples d’artistes). Son journal devient son livre, sa trace et lui impose à trente-et-un ans son suicide (le coupable n’est dont pas elle, mais son journal). Je relève la dernière phrase de l’article : « Les cahiers constituent souvent le seul laboratoire d’écriture de Sylvia Plath et la régularité même de sa pratique peut être le signe d’une improductivité, d’une impuissance pathologique à écrire en vue d’une publication. » J’ai ce sentiment-là parfois. Mais, d’un autre côté, qu’est-ce que « écrire en vue d’une publication » ?…