« Les intellectuels ont
trop conscience d’eux-mêmes. Entièrement préoccupés par leurs propres
problèmes, ils voient dans leurs perplexités un reflet des maux dont souffre le
monde. Ils écoutent avec ravissement les battements de leur cœur. Tout leur
est prétexte à se masturber l’âme afin de produire un flot de phrases. Et
parfois, ils parviennent à engendrer des expressions heureuses, suffisamment
elliptiques pour donner la sensation que leur pensée fait un bond extrêmement
habile, un arc électrique fulgurant à travers le vide, un message codé
indéchiffrable pour ceux qui ne sont pas initiés. Tout en eux est orienté pour
nourrir leur Moi inquiet et délicatement attentif, car l’univers tourne à
l’intérieur de leur ventre. »