James me parlait d’un Semprun qui venait de sortir. « Mais il est mort », ai-je dit. « Eh oui, il doit écrire de là-bas… » Je m’apprêtais à sortir ; un soudain coup de spleen m’a abattu. « Achète-toi un truc », m’a-t-il dit. « C’est une idée. Je vais passer à la librairie. » En même temps, je pensais au Voyage qui traîne tant, à tout ce qui m’attend dans la souffrance ; mais je pensais aussi à du neuf, à du japonais en particulier. Tout d’abord, rituel du midi, je suis allé au Klee avec L’Immonde. En en sortant, j’hésitais : la librairie ou le retour au bureau avec ma première cigarette ? Finalement, je suis allé à la librairie. J’ai jeté un œil aux tables des nouveautés étrangères, mais il n’y avait pas un seul Japonais à leur place habituelle. C’est en contournant les tables que je suis tombé sur le nom de Saramago ; dans les nouveautés ; avec ce titre : Relevé de terre. Qu’était-ce ? Un coup d’œil à la quatrième m’a appris qu’il s’agissait de son premier roman. Pourquoi n’a-t-il jamais été traduit ? En revenant au bureau, j’ai dit à James : « Savais-tu que Saramago avait été enterré avec une ramette de papier, un stylographe et des cartouches ? » « Je ne savais pas. » Je le lui ai montré : « Il l’a écrit dans sa tombe. » « J’espère qu’il avait aussi une lampe de poche. » « Pas besoin : il a la lumière divine pour l’éclairer… » C’est bien son premier roman, et non Le dieu manchot comme l’indique sa bibliographie (du moins, il en occupe la première place sans que rien ne précise qu’il s’agit du premier)… Après vérification, Manuel de peinture est de 1977 (au Portugal) et Terra do pecado le précède de trente années. Il y a encore quelques titres non traduits. Chic… J’ai hâte d’entamer ce Saramago inédit (mais ce soir, je vais me replonger dans le puzzle de la Salute : j’y ai encore consacré la soirée d’hier). (Hier, Claire Chazal à la télé parlait d’inondations à Venise et de l’« alta acqua ». Quelle truffe…)

 

31 octobre 2012