Le pion regagne sa case, et il fait pivoter l’échiquier afin d’attribuer à chacun sa couleur, tandis que l’autre parle.
Cette fois-ci, c’est sûr, il n’écoute plus, n’émet même plus de grognements, ne relève même plus ses mèches : mains jointes entre les genoux, il fixe l’échiquier et pense.
Il met une bonne minute avant de se décider à pousser le pion de C2 en C3. Puis une autre avant de relever les yeux et de dire :
« Alors, tu joues ? »
Il y a comme un sursaut de déroute chez son adversaire qui semble tout à coup se rendre compte de la présence de l’échiquier et de la partie à laquelle il doit participer. Il se tait et regarde les pièces, brièvement, vaguement, presque distraitement, et place le pion D7 en D5 pour aussitôt se remettre à parler.
Une chaîne à l’autre bout de la pièce diffuse le Concerto pour violon n°4 de Schnittke que Vivien affectionne tout particulièrement...