Si c’est le choc qui a actionné le mécanisme du sac – la collision avec le visage de Pierre-Paul et non celle avec le trottoir puisque déjà avant qu’il ne l’atteigne diverses choses commençaient à s’en libérer –, on ne sait, encore qu’il ne soit pas imprudent de l’affirmer. Mais quant à la réaction immédiate de Pierre-Paul, on ne peut se tromper, c’est bien lui qui l’a provoquée ; inhibant brutalement ces deux pôles qui cohabitent en lui – Pierre et Paul, c’est-à-dire le calme et le violent, le raisonnable et l’impulsif, le sédentaire et le voyageur, le solide et l’inquiet, qui, matraqués, se voient soumis au rôle de simples spectateurs face à une donnée inédite qui leur appartiendra de démêler –, il le force à une complète innovation : l’impuissance, la prostration et l’hébétude.
C’est dire que de réaction Pierre-Paul n’a point. Comme il était, il est resté, et si l’on excepte le cri qu’il a poussé – cri de son corps et non de lui-même –, il n’y a pas davantage de vie en lui que s’il était mort : inerte et ballant au milieu d’effets et de sacs répandus, il a les yeux fixés au ciel, laissant s’écouler sur sa joue un sang dont il n’a plus la moindre conscience...