Et dire qu’elle était là, à deux doigts, je n’avais qu’à tendre le bras, et non, même pas, juste la main, que la main à tendre, encore la lever à peine suffisait pour la toucher, pour l’agripper, pour l’attirer, pour la serrer... Ou alors, au lieu de la main – car, comme ça, au milieu de la rue, avec son type à côté qui ramassait son paquet sur la chaussée, est-ce que j’aurais osé, osé s’il n’y avait pas eu la surprise, je veux dire le fait de me retrouver là en face d’elle comme si elle s’y était matérialisée, le fait que je ne m’y attendais pas et que j’en ai perdu tous mes moyens, alors, si je l’avais vue de loin et avais pu donc me préparer à la rencontre, à ce moment-là est-ce que j’aurais osé, malgré la rue et son type à côté ? - au lieu de la main, oui (mais finalement, je ne crois pas que j’aurais osé), lui parler, lui dire quelques mots, ou juste un, rien qu’un seul mot qu’elle comprenne bien que l’opinion qu’elle s’était faite de moi chez moi était fausse, erronée, truquée, je ne suis pas comme ça, ç’a été plus fort que moi, et je ne demandais qu’à réparer, qu’à lui faire changer d’avis sur moi, moi qui, à ce moment-là, n’avait été animé que par la fièvre, le vertige, l’étourdissement de la savoir là près de moi et qu’elle comprenne aussi que maintenant qu’elle était près de moi de nouveau, encore plus près peut-être, les mêmes choses étaient là, la même sensation, identique, mais en plus fort...