Geneviève, c’est aussi une Polonaise (dont je n’ai que le souvenir phonétique du nom, que je ne saurais orthographier correctement du fait de la francisation dont nous le revêtions), pas très jolie non plus : des yeux un peu gros, un nez un peu long et je crois légèrement tombant ; à qui j’avais demandé, une fois, dans l’arrière-salle de notre café familier où trônait un billard à six trous auquel précisément nous jouions à ce moment-là, de bien vouloir m’accompagner au cinéma le dimanche suivant (qu’avais-je donc bu pour me permettre une telle hardiesse ?). J’étais avec le même ami. Elle a eu un sourire, où la timidité se mêlait à l’amusement, avant de me répondre non. De ce refus, j’ai conçu soulagement et déception. Soulagement, car elle ne me plaisait pas vraiment ; déception, car il n’est jamais agréable de se voir opposer un refus, même venant d’une fille pas très jolie – quoique très sympathique, sympathie amplement suffisante pour me faire accepter le mensonge que je m’apprêtais à me faire en cas d’acceptation de sa part : celui de la trouver belle l’espace d’une sortie au cinéma…

3 janvier 1991