Il est à présent trois heures, et le Turandot est plongé dans l’obscurité. La rue est de nouveau déserte et silencieuse, et il faudra attendre le matin pour que de nouveau un passant apparaisse. Il est sept heures, et ce passant est une passante, et plus qu’une passante, c’est une travailleuse, puisqu’il s’agit de Marguerite qui se rend à son nouveau travail.
Elle vient du boulevard G., du côté impair de la rue V., et tout de suite traverse pour aboutir en face de chez Élodie et Edwige au numéro 38, où elle s’arrête pour vérifier le contenu de son porte-monnaie, puis l’adresse où elle doit prendre ses nouvelles fonctions de serveuse. Rassurée, elle repart ; c’est-à-dire qu’elle descend le côté pair de la rue V. (voir plan), d’un bon pas, décidé et allègre puisque voilà plus de deux ans qu’elle n’a pas eu d’emploi. Elle ne se doute pas un instant que dans moins de trente secondes elle va de nouveau s’arrêter, ou plus exactement s’immobiliser, se pétrifier à la vue du corps inerte d’un homme qui barre l’accès à la porte d’une maison, couché sur le flanc et le visage collé à la marche. À ce moment-là, elle n’aura pas le moindre doute quant à l’état de cadavre de ce même homme, et elle aura tort, car Lazare a la peau dure, Lazare reprend conscience, commence à remuer, puis basculera sur le dos dans l’ignorance complète d’un petit bout de femme qui à fond de train est déjà parvenu au bas de la rue...