Restaient Amandine et Judith, toutes deux allongées, et j’avoue que face à cette position inédite pour moi, j’ai eu quelque inquiétude avant de commencer. Mais très vite, j’ai dû me rendre à cette évidence que j’avais largement mésestimé mon entregent à la découpe : il n’a pas fallu plus d’une minute pour que se dévoile devant moi l’Olympia de Manet, 1863, contre qui je n’ai pu retenir ma joie de me frotter ; quant à Judith, que je m’étais réservé pour la bonne bouche, ce Nu allongé de Boldoni étant, des six toiles proposées, celle qui me troublait le plus – et, pourrais-je dire, la seule qui me troublât, et me trouble encore, tant cette représentation me semble davantage être vouée à l’appel des sens qu’au simple désir d’art (encore qu’il faille voir dans quelle mesure la frontière n’est pas illusoire) –, il s’en est fallu de peu que je m’emporte, que je fasse fi des règles premières du jeu et m’empare tout à fait de cette composition admirable dont, durant certaines nuits d’égarement et de faiblesse, je m’étais parfois fait l’amant, m’abandonnant totalement, et trivialement, je l’avoue, à la séduction pure de cette forme étirée et alanguie dont le statut d’art à ces moments-là était bien le moindre de mes soucis... mais je me suis contenu, et pour réponse à l’inévitable « c’est gagné », je me suis simplement contenté de doux effleurements et de baisers...