Le journal s’était donc arrêté. Mais pas le Rapport. Pourquoi, puisque je n’en avais pas envie ? Je me suis efforcé de le poursuivre, de ne pas l’arrêter, quel qu’en puisse être le contenu. En même temps, je me disais qu’il y avait là peut-être quelque chose de malsain, ou de pas propre : rédiger le Rapport, y penser même, alors que je venais d’apprendre, le jour même, que le chien était condamné*. Mais je me disais aussi qu’il ne fallait pas me laisser gagner par cette pensée terrible, que de la laisser m’investir serait en quelque sorte l’accepter, et presque l’approuver. Alors, ne pas y penser. Ou du moins, puisqu’il est impossible de ne pas y penser et je ne fais que ça, y penser, l’édulcorer, l’accompagner d’autres pensées dont la charge inconsciente serait l’affrontement, comme si de combattre cette pensée atroce était une manière de combattre le mal qui actuellement se trouve en lui. De la pensée contre du physique. Mais du physique aveugle et sourd. L’être humain lutte (toujours ?) et écoute ce qui l’entoure. L’animal, qu’en sait-on ? Le vétérinaire dit : « Il y en a qui se laissent complètement aller ; d’autres qui s’accrochent. » Il dit encore : « La relation entre le maître et l’animal est primordiale, et parfois...» Oui, parfois. Il y a parfois des miracles, des revirements...
* c’est de là qu’est née l’histoire de Médard