Cette porte est légèrement entrouverte – et l’on sent l’inadvertance, le pêne mal enclenché qui de lui-même se serait délogé – et laisse passer, à peine feutrées, plusieurs voix alternées dont une animée.
Si elle ne s’était pas arrêtée au centre du hall, elle n’aurait sans doute pas remarqué cette porte. Mais la en voyant, à quelques pas d’elle – et l’on sent bien le décalage entre le caractère de vétusté, de condamnation de cette porte et l’actualité vivante et vibrante de ces voix –, elle ne peut résister à la curiosité ; et pour la satisfaire, s’en approche, la tire doucement à elle et se glisse à l’intérieur de l’obscurité que seules rompent, à l’autre bout d’une salle résonnante et désaffectée, quelques bougies éparses, posées à même le sol, près d’un groupe de jeunes filles assises ou accroupies.
Sauf une qui, debout au centre du cercle qu’elles forment, parle ou se tait avec assurance. L’on dirait une prêtresse, ou une prêcheuse. En tout cas, une directrice, une conductrice. Mais c’est pour le premier terme que penche plutôt Charlotte. Cela l’intrigue et l’inquiète, et, doucement, silencieusement, elle s’approche, ignorant encore que c’est durant sa lente progression que s’opérera la disparition progressive de l’existence de son petit ami dans ses pensées au profit du statut de douzième et ultime sirène du groupe neuf des « filles du Carmel »...
(C’est à la tête du secteur « providence » qu’elle sera promue...)