L’un des deux s’appelle Fernand. C’est le cadet. Il a douze ans. Du vocabulaire anglo-saxon, il ne connaît guère que O.K., walkman, sweat-shirt, mountain-bike, too much, fitness, star trek, fast-food, pin’s et fuck...
« Les Québécois disent “ épinglettes ” », lui a dit un jour Marcelin. « Un aussi joli mot ne mérite pas qu’on l’oublie. »
Fernand a eu une moue sans réelle signification outre celle de l’indifférence totale. C’est bien de son âge, et on ne saurait lui en vouloir, et son grand-père le comprend bien et le couve de petits soins, le couvre de présents, davantage qu’à l’aîné qui pourtant fait bien des efforts pour paraître grand et aimable.
« Et ton allemand ? » avait fait Marcelin.
« Schwer ! » avait répondu Fernand et ça avait fait éclater de rire sa mère, belle comme un ange en ce dimanche qu’elle célébrait dignement par sa seule présence.
« Une parfaite cloche ! » avait pensé Marcelin en la voyant entrer. « But what a gorgeous puss ! »
Quelle splendide fille. C’est exactement ce qu’il pense, tandis qu’elle s’approche et tend ses lèvres purpurines vers son visage fébrile et chafouin...