Et l’une à côté de l’autre, toutes trois remontent la rue : Sophie à gauche, Clotilde à droite, et Louise au centre, Louise qui déjà – par son attitude, par son apparence, par une espèce de charismatique aura qui n’est pas loin de poindre et de nimber toute sa personne – s’est instituée centre et noyau du groupe : c’est elle qui émet, diffuse, propage : c’est elle qui portera et prendra la parole et fera se joindre au trio les neuf autres membres manquantes (et encore à identifier, à localiser et à convaincre).

Mais pour l’heure, elles ne sont que trois, depuis la toute fraîche adhésion de Clotilde, compagne de chambre d’Estelle, qui sans mot dire avait suivi toute la démonstration de Louise – le truc de l’émetteur/récepteur, de l’intermédiaire/jouet d’ondes supérieures qui quoique souveraines sont dépourvues d’appareil vocal – et aussitôt avait été séduite, conquise, et, toujours sans mot dire et sans se poser davantage de questions, avait emboîté le pas des deux sirènes qui, face au refus que leur avait opposé Estelle, s’étaient vues contraintes à la retraite et à la remise en cause de leur quête dont, jusqu’à ce moment où en descendant les marches du foyer elles avaient entendu derrière elles un pas précipité et un appel (« Attendez-moi ! », par exemple), Clotilde avait été constamment absente : c’était Estelle qu’elles étaient venues visiter et c’est à peine si elles s’étaient aperçues de la présence de l’autre, figure pauvre, pâle, frêle et effacée...