Ce sourire ne peut se nommer, et il ne signifie rien, et Jules en est frappé, lui qui pourtant est habitué (à l’état de veille ou de sommeil, ces deux parts de son existence pareillement placées sous le signe de l’ivresse – tant éthylique qu’onirique, et Jules rêve aussi bien les yeux ouverts que les yeux fermés, comme il boit aussi bien éveillé qu’endormi) à toutes sortes de visages, d’expressions, de regards, de faciès, de formes et de couleurs, de créatures et d’horreurs.

« Serait-il possible d’avoir une chambre, s’il vous plaît ? »

C’est à peine si les lèvres ont bougé. Mais la voix est douce, posée, avec un rien de raucité qui la fait légèrement chantante et avantage l’articulation soignée de chaque syllabe qu’il veut parfaitement restituée. Et Jules en est comme rassuré, car il se rend compte à présent du doute dont il était pris l’instant d’avant quant à l’humanité – voire de l’existence – de l’homme... De l’homme qui désormais est un client. Un client qu’il ne sait comment satisfaire car il se rend compte aussi que c’est le premier client auquel il a à faire, qu’il s’agit de son premier client...