C’était à présent le moment de prendre des nouvelles, lui de là-bas dont il n’avait eu que peu d’échos, lui d’ici dont il n’avait jamais rien su – encore qu’il ait soupçonné qu’il n’y avait rien à savoir, puisqu’il n’y avait rien à en dire, car que dire de la solitude, même celle d’un ami ? Mais au lieu de cela, ils se sont tu, ont laissé glisser le temps sur leur commune contemplation du jardin. Et lorsqu’ils se sont enfin décidés à parler, ça n’a pas été pour parler des gens, des faits, des événements, des actes, des agissements, mais de sol, de terre, de cette terre dont ils étaient issus et sur laquelle, de laquelle, ils avaient toujours vécu. Et ainsi Romain le premier dit :

« Et comment, ça a été, ce mois-ci ?

– Oh, bien. Bien. Comme d’habitude. J’ai déchaumé les terres moissonnées, épandu les engrais et j’ai commencé les labours pour les semailles d’automne. Puis j’ai semé le colza, et la navette – je crois que ça va bien donner cette année –, puis le trèfle incarnat que j’avais arrêté un moment. Puis j’ai fait quelques cultures dérobées.

– Ah, les dérobées !...